quinta-feira, julho 31, 2008
La NASA ha descubierto un lago líquido en Titán, una de las lunas de Saturno
El Mundo (Madrid)
Lago de etano en Titán, la luna de Saturno. (Foto: AP)
WASHINGTON.- Científicos de la NASA confirmaron que al menos uno de los grandes lagos observados en Titán, una de las lunas de Saturno, contiene hidrocarbonos líquidos, según ha revelado el Laboratorio de Propulsión a Chorro (JPL).
El organismo científico de la Agencia Espacial Estadounidense (NASA) indicó en un comunicado que la confirmación convierte a Titán en el único cuerpo del sistema solar, aparte de la Tierra, que tiene líquido en su superficie.
Los científicos hicieron el descubrimiento a través del análisis de datos proporcionados por la sonda Cassini, un proyecto conjunto de la NASA y de la Agencia Espacial Europea (ESA).
Los instrumentos de la sonda identificaron materiales químicamente diferentes por la forma en que absorben y reflejan la luz infrarroja, dijo JPL.
Hasta antes de Cassini se creía que Titan albergaba grandes océanos de metano, etano y otros hidrocarbonos.
Según el comunicado, las aproximaciones a Saturno hechas por Cassini demostraron que no existen esos océanos, pero sí que hay cuerpos similares a un lago llenos de un material oscuro que, hasta ahora, no se sabía si era líquido o sólido.
"Esta es la primera observación que establece realmente que Titán tiene un lago lleno de líquido", según Bob Brown, científico de la Universidad de Arizona (EEUU) y director del grupo científico encargado del instrumento cartográfico de la sonda.
El cuerpo lacustre, identificado como Ontario Lacus, se encuentra en la región del polo sur de Titán y tiene una superficie de unos 20.000 kilómetros cuadrados.
"La detección de etano líquido confirma la idea de que en Titán hay lagos y mares llenos de metano y etano", dijo Larry Soderblom científico de Cassini en el Instituto Geológico de EEUU, en Arizona.
Según JPL, el etano se encuentra en una solución líquida con metano y otros hidrocarbonos, además de nitrógeno.
Las temperaturas sobre la superficie de Titán son de una media de 184 grados centígrados bajo cero y esas sustancias existen en ese ambiente gélido tanto en forma líquida y de gas.
Con los datos transmitidos por Cassini, los científicos también han determinado que existen procesos de evaporación y lluvias en Titán, señaló JPL.
Lago de etano en Titán, la luna de Saturno. (Foto: AP)
WASHINGTON.- Científicos de la NASA confirmaron que al menos uno de los grandes lagos observados en Titán, una de las lunas de Saturno, contiene hidrocarbonos líquidos, según ha revelado el Laboratorio de Propulsión a Chorro (JPL).
El organismo científico de la Agencia Espacial Estadounidense (NASA) indicó en un comunicado que la confirmación convierte a Titán en el único cuerpo del sistema solar, aparte de la Tierra, que tiene líquido en su superficie.
Los científicos hicieron el descubrimiento a través del análisis de datos proporcionados por la sonda Cassini, un proyecto conjunto de la NASA y de la Agencia Espacial Europea (ESA).
Los instrumentos de la sonda identificaron materiales químicamente diferentes por la forma en que absorben y reflejan la luz infrarroja, dijo JPL.
Hasta antes de Cassini se creía que Titan albergaba grandes océanos de metano, etano y otros hidrocarbonos.
Según el comunicado, las aproximaciones a Saturno hechas por Cassini demostraron que no existen esos océanos, pero sí que hay cuerpos similares a un lago llenos de un material oscuro que, hasta ahora, no se sabía si era líquido o sólido.
"Esta es la primera observación que establece realmente que Titán tiene un lago lleno de líquido", según Bob Brown, científico de la Universidad de Arizona (EEUU) y director del grupo científico encargado del instrumento cartográfico de la sonda.
El cuerpo lacustre, identificado como Ontario Lacus, se encuentra en la región del polo sur de Titán y tiene una superficie de unos 20.000 kilómetros cuadrados.
"La detección de etano líquido confirma la idea de que en Titán hay lagos y mares llenos de metano y etano", dijo Larry Soderblom científico de Cassini en el Instituto Geológico de EEUU, en Arizona.
Según JPL, el etano se encuentra en una solución líquida con metano y otros hidrocarbonos, además de nitrógeno.
Las temperaturas sobre la superficie de Titán son de una media de 184 grados centígrados bajo cero y esas sustancias existen en ese ambiente gélido tanto en forma líquida y de gas.
Con los datos transmitidos por Cassini, los científicos también han determinado que existen procesos de evaporación y lluvias en Titán, señaló JPL.
sábado, julho 26, 2008
La petite histoire des matières première (9/10)
Le Temps (Genève)
Des financiers en quête de gros cailloux
DIAMANTS. Un fonds table sur la raréfaction des grosses pierres, plus chères de 60% en six mois.
por Pierre-Alexandre Sallier
Une méconnaissance de la «marchandise». C'est peut-être cela que les vieux routiers du négoce reprochent le plus aux financiers ayant surgi sur «leurs» marchés. Plus encore que l'envolée et l'instabilité des cours provoquée par leur arrivée.
Sucre brésilien, nickel calédonien, coprah philippin... autant de produits de base relégués au rang d'actifs financiers. Même les diamants. «Par-delà son image un peu ésotérique, on retrouve exacerbée dans le diamant toute la problématique des matières premières», assure Stéphane Barbier de la Serre, responsable du conseil du Diamond Capital Fund.
Des cailloux à un million
Coté sur la bourse de Londres depuis un mois, ce fonds d'investissement, lancé par la maison de gestion lausannoise Diapason CM, ne fait qu'une seule chose avec les 75 millions de dollars récoltés: acheter des diamants. Les plus gros. Ceux pesant leur million de dollars. Ces deux cents pierres de plus de 10 carats arrachées du sol chaque année. Pour mieux les mettre au frais, dans un coffre d'UBS à Genève. Et attendre que leur prix s'envole. «Nous offrons à nos souscripteurs la diversification de leur investissement - dans une grande variété de pierres - une protection contre l'inflation, contre la baisse du dollar» vante Stéphane Barbier de la Serre.
La crainte du «squeeze»
Oubliés, Breakfast at Tiffany's, les diamantaires d'Anvers, les ventes de Christie's. Selon le financier, il y aurait, «plus de points communs avec le marché de l'or, qu'avec celui de l'art; à la différence près que les diamants de la plus haute qualité sont 150000 fois plus rares que le métal jaune». Les gemmes? De simples «commodités». Un minerai comme un autre. Mêmes difficultés à trouver de nouveaux gisements pour les géants de la mine BHP, Rio ou l'Anglo. Même envolée de la demande: la De Beers a vu ses ventes progresser de 10% en six mois, en raison de la forte demande asiatique. Même épuisement des stocks. Même envolée des prix. Selon le négociant new-yorkais Rapaport, les pierres de moins de 0,5 carat se sont appréciées de 7% en six mois, celles de moins de 5 carats se sont envolées de 37%, et celles de 10 carats de... 63%.
Parmi les diamantaires, l'irruption d'un tel fonds d'investissement - le premier du genre - fait évidemment craindre un «squeeze», un étranglement du marché entretenant la rareté. «Avec quelques dizaines de millions de dollars, notre influence reste marginale... et le report d'un an du lancement de notre fonds n'a pas empêché les cours de monter», rétorque Stéphane Barbier de la Serre. Au contraire, «nombre d'acteurs de l'univers du diamant, très endettés, voient d'un bon œil cette bouffée d'oxygène apportée au marché». La magie, elle, a disparu. Devenus investissement alternatif, les cailloux disparaissent du cou des élégantes (très) fortunées.
Fiche signalétique: le diamant
Pierre-Alexandre Sallier
Pensez-y. L'extraction d'un banal diamant de bague de fiançailles nécessite de remuer entre 200 et 400 millions de fois son volume de roches. On comprend sa rareté. Car sinon, le diamant est exclusivement constitué de carbone, tout comme le... graphite, qui a simplement cristallisé sous des pressions bien plus faibles.
Le diamant s'est formé à 150 ou 200 km de profondeur, sous des pressions de 70 tonnes par cm2 et à une température de 2000°C.
Le secret des diamants se nomme kimberlite. Des cônes souterrains de roches volcaniques, remontant jusqu'à la surface, hérités de l'éruption de volcans actifs il y a 70 à 140 millions d'années, en Afrique du Sud, Inde, Australie ou Amérique du Sud. Ceci explique la forme de gigantesques «trous», extrêmement profonds, des mines de diamants. Les cheminées des kimberlites peuvent avoir un diamètre de quelques dizaines de mètres à 2 kilomètres. Ce qui explique les difficultés à les trouver.
Le diamant brut destiné à la joaillerie représente un marché de 15 milliards de dollars par an (et de 70 milliards au niveau de la bijouterie).
Des financiers en quête de gros cailloux
DIAMANTS. Un fonds table sur la raréfaction des grosses pierres, plus chères de 60% en six mois.
por Pierre-Alexandre Sallier
Une méconnaissance de la «marchandise». C'est peut-être cela que les vieux routiers du négoce reprochent le plus aux financiers ayant surgi sur «leurs» marchés. Plus encore que l'envolée et l'instabilité des cours provoquée par leur arrivée.
Sucre brésilien, nickel calédonien, coprah philippin... autant de produits de base relégués au rang d'actifs financiers. Même les diamants. «Par-delà son image un peu ésotérique, on retrouve exacerbée dans le diamant toute la problématique des matières premières», assure Stéphane Barbier de la Serre, responsable du conseil du Diamond Capital Fund.
Des cailloux à un million
Coté sur la bourse de Londres depuis un mois, ce fonds d'investissement, lancé par la maison de gestion lausannoise Diapason CM, ne fait qu'une seule chose avec les 75 millions de dollars récoltés: acheter des diamants. Les plus gros. Ceux pesant leur million de dollars. Ces deux cents pierres de plus de 10 carats arrachées du sol chaque année. Pour mieux les mettre au frais, dans un coffre d'UBS à Genève. Et attendre que leur prix s'envole. «Nous offrons à nos souscripteurs la diversification de leur investissement - dans une grande variété de pierres - une protection contre l'inflation, contre la baisse du dollar» vante Stéphane Barbier de la Serre.
La crainte du «squeeze»
Oubliés, Breakfast at Tiffany's, les diamantaires d'Anvers, les ventes de Christie's. Selon le financier, il y aurait, «plus de points communs avec le marché de l'or, qu'avec celui de l'art; à la différence près que les diamants de la plus haute qualité sont 150000 fois plus rares que le métal jaune». Les gemmes? De simples «commodités». Un minerai comme un autre. Mêmes difficultés à trouver de nouveaux gisements pour les géants de la mine BHP, Rio ou l'Anglo. Même envolée de la demande: la De Beers a vu ses ventes progresser de 10% en six mois, en raison de la forte demande asiatique. Même épuisement des stocks. Même envolée des prix. Selon le négociant new-yorkais Rapaport, les pierres de moins de 0,5 carat se sont appréciées de 7% en six mois, celles de moins de 5 carats se sont envolées de 37%, et celles de 10 carats de... 63%.
Parmi les diamantaires, l'irruption d'un tel fonds d'investissement - le premier du genre - fait évidemment craindre un «squeeze», un étranglement du marché entretenant la rareté. «Avec quelques dizaines de millions de dollars, notre influence reste marginale... et le report d'un an du lancement de notre fonds n'a pas empêché les cours de monter», rétorque Stéphane Barbier de la Serre. Au contraire, «nombre d'acteurs de l'univers du diamant, très endettés, voient d'un bon œil cette bouffée d'oxygène apportée au marché». La magie, elle, a disparu. Devenus investissement alternatif, les cailloux disparaissent du cou des élégantes (très) fortunées.
Fiche signalétique: le diamant
Pierre-Alexandre Sallier
Pensez-y. L'extraction d'un banal diamant de bague de fiançailles nécessite de remuer entre 200 et 400 millions de fois son volume de roches. On comprend sa rareté. Car sinon, le diamant est exclusivement constitué de carbone, tout comme le... graphite, qui a simplement cristallisé sous des pressions bien plus faibles.
Le diamant s'est formé à 150 ou 200 km de profondeur, sous des pressions de 70 tonnes par cm2 et à une température de 2000°C.
Le secret des diamants se nomme kimberlite. Des cônes souterrains de roches volcaniques, remontant jusqu'à la surface, hérités de l'éruption de volcans actifs il y a 70 à 140 millions d'années, en Afrique du Sud, Inde, Australie ou Amérique du Sud. Ceci explique la forme de gigantesques «trous», extrêmement profonds, des mines de diamants. Les cheminées des kimberlites peuvent avoir un diamètre de quelques dizaines de mètres à 2 kilomètres. Ce qui explique les difficultés à les trouver.
Le diamant brut destiné à la joaillerie représente un marché de 15 milliards de dollars par an (et de 70 milliards au niveau de la bijouterie).
sexta-feira, julho 25, 2008
La petite histoire des matières première (8/10)
Le Temps (Genève)
L'uranium, redouté et convoité
ENERGIE. Les réserves sont absorbées à la vitesse grand V. Les cours pourraient repartir à la hausse.
por Philippe Gumy
Lorsque le chimiste allemand Martin Heinrich Klaproth découvrit l'uranium, le 24 septembre 1789, l'heure n'était pas à la révolution... énergétique. Le savant était à mille lieues de se douter que cette substance deviendrait un jour l'un des combustibles les plus recherchés au monde.
Ce n'est que cent ans plus tard, en 1896, que le physicien français Henri Becquerel découvrit la radioactivité naturelle. Cette dernière restera encore pendant quelques décennies confinée à un rôle aussi purement thérapeutique que peu maîtrisé. Quant à l'uranium, il ne servait concrètement qu'à colorer des verres, des céramiques ou encore de la porcelaine. Sa couleur? Un blanc argenté, brillant.
Dans le Limousin
L'invention de la bombe atomique, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, change tout, quasiment du jour au lendemain. L'uranium accède au rang de ressource hautement stratégique, et les puissances se lancent dans une course à la prospection. La France ouvre de multiples mines, dont la dernière, en Haute-Vienne, ne cessera d'être exploitée qu'en... 2001. En matière civile, l'URSS est le premier pays à produire de l'énergie nucléaire. Nous sommes en 1954. La France mettra son premier réacteur en fonction en 1963, la Suisse en 1969.
Les années 1970 resteront l'âge d'or de l'uranium. Jusqu'ici essentiellement recherché à des fins militaires - les missiles, bombes et sous-marins en absorbent des tonnes -, le yellowcake accède au rang des «denrées» civiles. En tout début de décennie, la livre d'oxyde d'uranium (U3O8) s'échange dans les 6 dollars (de l'époque). Le premier choc pétrolier propulse ce cours jusqu'à 43 dollars en 1975-1976.
L'opinion publique subit son premier électrochoc en 1979. La moitié du cœur de l'un des réacteurs de la centrale britannique de Three Mile Island fond. A peine deux mois après sa sortie, le film d'anticipation intitulé le Syndrome chinois semble se concrétiser.
Le creux des années 80
L'atome fait de plus en plus peur. Et le coup de grâce, c'est bien sûr Tchernobyl. L'uranium retombe à 7 dollars la livre! Mis à part un petit sursaut purement spéculatif dans les années 1990, cette matière, qui ne dispose par ailleurs pas d'un marché vraiment organisé, n'intéresse plus personne.
Cours en fusion
Le réchauffement climatique, la peur de la fin de l'ère pétrolière, les besoins accrus en énergie sous l'effet du développement fulgurant de ce qui était encore il y a quinze ans le tiers-monde ont changé fondamentalement la donne. L'uranium a flambé ces deux dernières années, à plus de 100 dollars la livre. Excessif? Pas aux yeux de certains experts, qui le voient à 250 dollars dans quelques mois. Actuellement, le combustible nucléaire vaut 60 dollars la livre au New York Mercantile Exchange (Nymex), qui propose depuis un an un contrat à terme, débouclé chaque mois.
Fiche signalétique: l'uranium
Philippe Gumy
La production annuelle d'uranium atteint 40000 à 45000 tonnes annuelles. Alors que la consommation dépasse les 60000 tonnes. Les stocks suffisent pour l'instant. Les principaux pays extracteurs sont le Canada (29% en 2004), l'Australie (22%), le Kazakhstan (9%) et le Niger (8%).
Les réserves prouvées sont de 2,64 millions de tonnes. A noter que la querelle d'experts sur les réserves supposées d'uranium découle avant tout du fait que cet élément est présent dans toute l'écorce terrestre, comme dans l'eau. Sa concentration est toutefois souvent trop faible pour songer à l'extraire. Pour l'AIEA, l'uranium est actuellement intéressant lorsque le coût d'extraction de cet élément à partir d'une roche est inférieur à 80 dollars le kilo.
La Suisse a prospecté très officiellement dans ses propres montagnes au cours de la première moitié des années 1990, notamment au sud d'Isérables et à Naters, en Valais. Plus aucune recherche n'a eu lieu depuis lors sur le territoire national. Aucun gisement économiquement viable n'y a été mis au jour.
L'uranium, redouté et convoité
ENERGIE. Les réserves sont absorbées à la vitesse grand V. Les cours pourraient repartir à la hausse.
por Philippe Gumy
Lorsque le chimiste allemand Martin Heinrich Klaproth découvrit l'uranium, le 24 septembre 1789, l'heure n'était pas à la révolution... énergétique. Le savant était à mille lieues de se douter que cette substance deviendrait un jour l'un des combustibles les plus recherchés au monde.
Ce n'est que cent ans plus tard, en 1896, que le physicien français Henri Becquerel découvrit la radioactivité naturelle. Cette dernière restera encore pendant quelques décennies confinée à un rôle aussi purement thérapeutique que peu maîtrisé. Quant à l'uranium, il ne servait concrètement qu'à colorer des verres, des céramiques ou encore de la porcelaine. Sa couleur? Un blanc argenté, brillant.
Dans le Limousin
L'invention de la bombe atomique, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, change tout, quasiment du jour au lendemain. L'uranium accède au rang de ressource hautement stratégique, et les puissances se lancent dans une course à la prospection. La France ouvre de multiples mines, dont la dernière, en Haute-Vienne, ne cessera d'être exploitée qu'en... 2001. En matière civile, l'URSS est le premier pays à produire de l'énergie nucléaire. Nous sommes en 1954. La France mettra son premier réacteur en fonction en 1963, la Suisse en 1969.
Les années 1970 resteront l'âge d'or de l'uranium. Jusqu'ici essentiellement recherché à des fins militaires - les missiles, bombes et sous-marins en absorbent des tonnes -, le yellowcake accède au rang des «denrées» civiles. En tout début de décennie, la livre d'oxyde d'uranium (U3O8) s'échange dans les 6 dollars (de l'époque). Le premier choc pétrolier propulse ce cours jusqu'à 43 dollars en 1975-1976.
L'opinion publique subit son premier électrochoc en 1979. La moitié du cœur de l'un des réacteurs de la centrale britannique de Three Mile Island fond. A peine deux mois après sa sortie, le film d'anticipation intitulé le Syndrome chinois semble se concrétiser.
Le creux des années 80
L'atome fait de plus en plus peur. Et le coup de grâce, c'est bien sûr Tchernobyl. L'uranium retombe à 7 dollars la livre! Mis à part un petit sursaut purement spéculatif dans les années 1990, cette matière, qui ne dispose par ailleurs pas d'un marché vraiment organisé, n'intéresse plus personne.
Cours en fusion
Le réchauffement climatique, la peur de la fin de l'ère pétrolière, les besoins accrus en énergie sous l'effet du développement fulgurant de ce qui était encore il y a quinze ans le tiers-monde ont changé fondamentalement la donne. L'uranium a flambé ces deux dernières années, à plus de 100 dollars la livre. Excessif? Pas aux yeux de certains experts, qui le voient à 250 dollars dans quelques mois. Actuellement, le combustible nucléaire vaut 60 dollars la livre au New York Mercantile Exchange (Nymex), qui propose depuis un an un contrat à terme, débouclé chaque mois.
Fiche signalétique: l'uranium
Philippe Gumy
La production annuelle d'uranium atteint 40000 à 45000 tonnes annuelles. Alors que la consommation dépasse les 60000 tonnes. Les stocks suffisent pour l'instant. Les principaux pays extracteurs sont le Canada (29% en 2004), l'Australie (22%), le Kazakhstan (9%) et le Niger (8%).
Les réserves prouvées sont de 2,64 millions de tonnes. A noter que la querelle d'experts sur les réserves supposées d'uranium découle avant tout du fait que cet élément est présent dans toute l'écorce terrestre, comme dans l'eau. Sa concentration est toutefois souvent trop faible pour songer à l'extraire. Pour l'AIEA, l'uranium est actuellement intéressant lorsque le coût d'extraction de cet élément à partir d'une roche est inférieur à 80 dollars le kilo.
La Suisse a prospecté très officiellement dans ses propres montagnes au cours de la première moitié des années 1990, notamment au sud d'Isérables et à Naters, en Valais. Plus aucune recherche n'a eu lieu depuis lors sur le territoire national. Aucun gisement économiquement viable n'y a été mis au jour.
quinta-feira, julho 24, 2008
La petite histoire des matières première (7/10)
Le Temps (Genève)
Petits arrangements entre amis sur le coprah
OLEAGINEUX. Le prix de l'huile de coco s'envole. Deux maisons de négoce auraient étranglé le marché.
por Pierre-Alexandre Sallier
Sa simple évocation rime avec mers du Sud, alizés, vahinés, et autres clichés de pacotille. Comme ceux des spots publicitaires pour un célèbre gel douche censé venir de... Tahiti. L'association n'est d'ailleurs pas fortuite. Le coprah sert, entre autres, à faire «mousser» le savon. Le rêve s'interrompt ici. Car des intérêts bien plus prosaïques sont à l'origine du renchérissement aussi récent qu'étrange connu par cette huile tropicale en début d'année.
Une bien étrange envolée
Apparemment, rien de plus normal. Tous les oléagineux ont connu une folle inflation. Reste que le prix du coprah s'est nettement détaché du peloton. A 1200 dollars la tonne début janvier sur le port de Rotterdam, son cours - qui suivait jusque-là celui de sa cousine l'huile de palmiste - est parti en vrille. 1400 dollars fin février. 1500 dollars en mars. Plus de 1800 dollars en juin. 50% de hausse en six mois. Du jamais-vu. Il faut remonter à la crise asiatique - l'Indonésie avait décrété un embargo sur le palmiste - pour retrouver une telle envolée.
Problème, les explications usuelles ne permettent guère d'y voir clair. Car, contrairement à d'autres oléagineux, il n'y a pas de pénurie sur le coprah. Pour l'instant, aucun typhon n'est venu coucher les cocotiers philippins, comme ce fut le cas en 2006, coûtant près du tiers de la production. Certes, l'archipel - qui, avec l'Indonésie, fournit les huit dixièmes des noix de coco - a décidé de transformer 1% de son coprah en biodiesel. Cela ne saurait suffire.
«Squeeze» aux Philippines!
Non, sur un marché aussi étroit, où il suffit d'un seul cargo pour fournir les 45000 tonnes dont l'Europe a besoin chaque mois, une telle frénésie ne peut qu'alimenter le soupçon. Celui d'un «squeeze». C'est-à-dire de l'étranglement du marché par des individus soucieux de faire monter artificiellement les prix. A leur plus grand profit.
Dans le milieu des oléagineux, deux grandes maisons de négoce internationales exerçant un quasi-monopole sur le chargement des cargaisons en partance des Philippines sont même pointées du doigt. Elles auraient voulu écarter un impétrant tentant de s'immiscer dans leur «business». «Normalement, les navires sont chargés soit le 1er, soit le 30 du mois; or, en mars, on s'est soudain entendu annoncer que le chargement d'un cargo de 80000 tonnes - soit deux mois de consommation - aurait 30 jours de retard, laissant soudain les acheteurs sans marchandise», s'emporte un négociant français. La ruée sur le moindre stock disponible a été d'autant plus frénétique que cette menace de pénurie arrivait entre avril et juin; au moment précis où les fabricants de crèmes glacées en ont le plus besoin. Sans compter que les fabricants de détergents ne détiennent plus guère de réserves, ayant pris l'habitude de stocker le produit dans son pays d'origine, pour des raisons de coût. Le squeeze, silencieux, n'en aurait été que plus aisé. Et le repli des cours connu ces dernières semaines se serait déjà chargé d'en effacer la moindre trace.
Fiche signalétique: le coprah
Pierre-Alexandre Sallier
Huile de coprah ou «coconut oil»? Le coprah désigne en réalité la chair blanche (l'albumen) de la noix de coco, râpée et séchée. On peut ensuite la presser. Le coprah de bonne qualité fournit plus de 60% d'huile. Coprah rime alors avec monoï: l'huile est parfumée grâce à la macération de fleurs de tiare, ses vertus hydratantes faisant le reste, après le coucher du soleil. Sa principale utilisation demeure les détergents - l'huile de coco se cache derrière les «tensioactifs» - la margarine, les crèmes glacées... Le coprah fut ainsi à l'origine de la célèbre lessive «Tide» à la fin des années 40 et l'usine de lessive du géant Procter & Gamble, à Sacramento, reste l'un des principaux utilisateurs d'huile de coco au monde. Sa cousine, l'huile de palmiste - elles sont toutes deux qualifiées d'huiles lauriques - lui fait souvent concurrence. Selon la FAO, environ 5,3 millions de tonnes de coprah seront produits en 2008. A titre de comparaison, l'offre mondiale d'huile de palmiste tourne autour de 10 millions de tonnes... bien loin des 220 millions de tonnes d'huile de soja triturées chaque année.
Petits arrangements entre amis sur le coprah
OLEAGINEUX. Le prix de l'huile de coco s'envole. Deux maisons de négoce auraient étranglé le marché.
por Pierre-Alexandre Sallier
Sa simple évocation rime avec mers du Sud, alizés, vahinés, et autres clichés de pacotille. Comme ceux des spots publicitaires pour un célèbre gel douche censé venir de... Tahiti. L'association n'est d'ailleurs pas fortuite. Le coprah sert, entre autres, à faire «mousser» le savon. Le rêve s'interrompt ici. Car des intérêts bien plus prosaïques sont à l'origine du renchérissement aussi récent qu'étrange connu par cette huile tropicale en début d'année.
Une bien étrange envolée
Apparemment, rien de plus normal. Tous les oléagineux ont connu une folle inflation. Reste que le prix du coprah s'est nettement détaché du peloton. A 1200 dollars la tonne début janvier sur le port de Rotterdam, son cours - qui suivait jusque-là celui de sa cousine l'huile de palmiste - est parti en vrille. 1400 dollars fin février. 1500 dollars en mars. Plus de 1800 dollars en juin. 50% de hausse en six mois. Du jamais-vu. Il faut remonter à la crise asiatique - l'Indonésie avait décrété un embargo sur le palmiste - pour retrouver une telle envolée.
Problème, les explications usuelles ne permettent guère d'y voir clair. Car, contrairement à d'autres oléagineux, il n'y a pas de pénurie sur le coprah. Pour l'instant, aucun typhon n'est venu coucher les cocotiers philippins, comme ce fut le cas en 2006, coûtant près du tiers de la production. Certes, l'archipel - qui, avec l'Indonésie, fournit les huit dixièmes des noix de coco - a décidé de transformer 1% de son coprah en biodiesel. Cela ne saurait suffire.
«Squeeze» aux Philippines!
Non, sur un marché aussi étroit, où il suffit d'un seul cargo pour fournir les 45000 tonnes dont l'Europe a besoin chaque mois, une telle frénésie ne peut qu'alimenter le soupçon. Celui d'un «squeeze». C'est-à-dire de l'étranglement du marché par des individus soucieux de faire monter artificiellement les prix. A leur plus grand profit.
Dans le milieu des oléagineux, deux grandes maisons de négoce internationales exerçant un quasi-monopole sur le chargement des cargaisons en partance des Philippines sont même pointées du doigt. Elles auraient voulu écarter un impétrant tentant de s'immiscer dans leur «business». «Normalement, les navires sont chargés soit le 1er, soit le 30 du mois; or, en mars, on s'est soudain entendu annoncer que le chargement d'un cargo de 80000 tonnes - soit deux mois de consommation - aurait 30 jours de retard, laissant soudain les acheteurs sans marchandise», s'emporte un négociant français. La ruée sur le moindre stock disponible a été d'autant plus frénétique que cette menace de pénurie arrivait entre avril et juin; au moment précis où les fabricants de crèmes glacées en ont le plus besoin. Sans compter que les fabricants de détergents ne détiennent plus guère de réserves, ayant pris l'habitude de stocker le produit dans son pays d'origine, pour des raisons de coût. Le squeeze, silencieux, n'en aurait été que plus aisé. Et le repli des cours connu ces dernières semaines se serait déjà chargé d'en effacer la moindre trace.
Fiche signalétique: le coprah
Pierre-Alexandre Sallier
Huile de coprah ou «coconut oil»? Le coprah désigne en réalité la chair blanche (l'albumen) de la noix de coco, râpée et séchée. On peut ensuite la presser. Le coprah de bonne qualité fournit plus de 60% d'huile. Coprah rime alors avec monoï: l'huile est parfumée grâce à la macération de fleurs de tiare, ses vertus hydratantes faisant le reste, après le coucher du soleil. Sa principale utilisation demeure les détergents - l'huile de coco se cache derrière les «tensioactifs» - la margarine, les crèmes glacées... Le coprah fut ainsi à l'origine de la célèbre lessive «Tide» à la fin des années 40 et l'usine de lessive du géant Procter & Gamble, à Sacramento, reste l'un des principaux utilisateurs d'huile de coco au monde. Sa cousine, l'huile de palmiste - elles sont toutes deux qualifiées d'huiles lauriques - lui fait souvent concurrence. Selon la FAO, environ 5,3 millions de tonnes de coprah seront produits en 2008. A titre de comparaison, l'offre mondiale d'huile de palmiste tourne autour de 10 millions de tonnes... bien loin des 220 millions de tonnes d'huile de soja triturées chaque année.
segunda-feira, julho 21, 2008
Deus bíblico pode ser fusão de vários deuses pagãos, dizem especialistas
Ambiente Brasil
A afirmação pode soar desrespeitosa para judeus ou cristãos, mas não está muito longe da verdade: Javé, o Deus do Antigo Testamento, parece ter múltiplas personalidades. Para ser mais exato, especialistas que estudam os textos bíblicos, lêem antigas inscrições encontradas nos arredores de Israel ou escavam sítios arqueólogicos estão reconhecendo a influência conjunta de diversos deuses pagãos antigos no retrato de Javé traçado pela Bíblia.
A idéia não é demonstrar que o Deus bíblico não passa de mais um personagem da mitologia. Os pesquisadores querem apenas entender como elementos comuns à cultura do antigo Oriente Próximo, e principalmente da região onde hoje ficam o estado de Israel, os territórios palestinos, o Líbano e a Síria, contribuíram para as idéias que os antigos israelitas tinham sobre os seres divinos. As conclusões ainda são preliminares, mas há bons indícios de que Javé é uma fusão entre um deus idoso e paternal e um jovem deus guerreiro, com pitadas de outras divindades – uma delas do sexo feminino.
O ponto de partida dessas análises é o fundo cultural comum entre o antigo povo de Israel e seus vizinhos e adversários, os cananeus (moradores da terra de Canaã, como era chamada a região entre o rio Jordão e o mar Mediterrâneo em tempos antigos). A Bíblia retrata os israelitas como um povo quase totalmente distinto dos cananeus, mas os dados arqueólogicos revelam profundas semelhanças de língua, costumes e cultura material – a língua de Canaã, por exemplo, era só um dialeto um pouco diferente do hebraico bíblico.
Memórias de Ugarit
Os cananeus não deixaram para trás uma herança literária tão rica quanto a Bíblia. No entanto, poucos quilômetros ao norte de Canaã, na atual Síria, ficava a cidade-Estado de Ugarit, cuja língua e cultura eram praticamente idênticas às de seus primos do sul. Ugarit foi destruída por invasores bárbaros em 1200 a.C., mas os arqueólogos recuperaram numerosas inscrições da cidade, nas quais dá para entrever uma mitologia que apresenta semelhanças (e diferenças) impressionantes com as narrativas da Bíblia. “Por isso, Ugarit é uma parte importante do fundo cultural que, mais tarde, daria origem às tribos de Israel”, resume Christine Hayes, professora de estudos clássicos judaicos da Universidade Yale (EUA).
Uma das figuras mais proeminentes nesses textos é El – nome que quer dizer simplesmente “deus” nas antigas línguas da região, mas que também se refere a uma divindade específica, o patriarca, ou chefe de família, dos deuses. “Patriarca” é a palavra-chave: o El de Ugarit tem paralelos muito específicos com a figura de Deus durante o período patriarcal, retratado no livro do Gênesis e personificado pelos ancestrais dos israelitas: Abraão, Isaac e Jacó.
Nesses textos da Bíblia há, por exemplo, referências a El Shadday (literalmente “El da Montanha”, embora a expressão normalmente seja traduzida como “Deus Todo-Poderoso”), El Elyon (“Deus Altíssimo”) e El Olam (“Deus Eterno”). O curioso é que, na mitologia ugarítica, El também é imaginado vivendo no alto de uma montanha e visto como um ancião sábio, de vida eterna.
Tal como os patriarcas bíblicos, El é uma espécie de nômade, vivendo numa versão divina da tenda dos beduínos; e, mais importante ainda, El tem uma relação especial com os chefes dos clãs, tal como Abraão, Isaac e Jacó: eles os protege e lhes promete uma descendência numerosa. Ora, a maior parte do livro do Gênesis é o relato da amizade de Deus com os patriarcas israelitas, guiando suas migrações e fazendo a promessa solene de transformar a descendência deles num povo “mais numeroso que as estrelas do céu”.
Israel ou “Israías”?
Outros dados, mais circunstanciais, traçam outros elos entre o Deus do Gênesis e El: num dos trechos aparentemente mais antigos do livro bíblico, Deus é chamado pelo epíteto poético de “Touro de Jacó” (frase às vezes traduzida como “Poderoso de Jacó”), enquanto a mitologia ugarítica compara El freqüentemente a um touro. Finalmente, o próprio nome do povo escolhido – Israel, originalmente dado como alcunha ao patriarca Jacó – carrega o elemento “-el”, lembra Airton José da Silva, professor de Antigo Testamento do Centro de Estudos da Arquidiocese de Ribeirão Preto (SP).
“É o nome do deus cananeu, mais um indício de que Israel surge dentro de Canaã, por um processo gradual”, diz Silva. Ele argumenta que, se Javé fosse desde sempre a divindade dos israelitas, o nome desse povo seria “Israías”. Isso porque o elemento adaptado como “-ías” em português (algo como -yahu) era, em hebraico, uma forma contrata do nome “Javé”. Curiosamente, o elemento se torna dominante nos chamados nomes teofóricos (ligados a uma divindade) dados a israelitas no período da monarquia, a partir dos séculos 10 a.C. e 9 a.C.
E esse nome (provavelmente Yahweh em hebraico; a sonoridade original foi obscurecida pelo costume de não pronunciar a palavra por respeito) é um enigma e tanto. As tradições bíblicas são um tanto contraditórias, mas pelo menos uma fonte das Escrituras afirma que Javé só deu a conhecer seu verdadeiro nome aos israelitas quando convocou Moisés para ser seu profeta e arrancar os descendentes de Jacó da escravidão no Egito. (A Moisés, Deus diz que apareceu a Abraão, Isaac e Jacó como “El Shadday”.) O problema é que ninguém sabe qual a origem de Javé, o qual nunca parece ter sido uma divindade cananéia, exatamente como diz o autor bíblico.
Senhor do deserto
A esmagadora maioria dos arqueólogos e historiadores modernos não coloca suas fichas no Êxodo maciço de 600 mil israelitas (sem contar mulheres e crianças) do Egito, por dois motivos: a semelhança entre Israel e os cananeus e a falta de qualquer indício direto da fuga. Mas muitos supõem que um pequeno componente dos grupos que se juntaram para formar a nação israelita tenha sido formado por adoradores de Javé, que acabaram popularizando o culto. Quem seriam esses primeiros javistas? Uma pista pode vir de alguns documentos egípcios, que os chamam de Shasu – algo como “nômades” ou “beduínos”.
“Duas ou três inscrições egípcias mencionam um lugar chamado 'Yhwh dos Shasu', o que, para alguns especialistas, parece ser 'Javé dos Shasu'. Talvez sim, talvez não. Não temos como saber ao certo”, diz Mark S. Smith, pesquisador da Universidade de Nova York e autor do livro “The Early History of God” (“A História Antiga de Deus”, ainda sem tradução para o português).
“É menos provável que o culto a Javé venha de dentro da Palestina e da Síria, e um pouco mais plausível que ele tenha se originado em certas regiões da Arábia”, diz Airton da Silva. Mark Smith lembra que algumas das passagens poéticas consideradas as mais antigas da Bíblia – nos livros dos Juízes e nos Salmos, por exemplo – referem-se ao “lar” de Javé em locais denominados “Teiman” ou “Paran”. Aparentemente, são áreas desérticas, apropriadas para a vida de nomadismo. “Muitos especialistas localizam essa região no que seria o noroeste da atual Arábia Saudita, ao sul da antiga Judá [parte mais meridional dos territórios israelitas]”, diz Smith.
Guerreiro divino
Seja como for, quando Javé entra em cena com seu “nome oficial” durante o Êxodo bíblico, a impressão que se tem é que ele já absorveu boa parte das características de um outro deus cananeu: Baal (literalmente “senhor”, “mestre” e, em certos contextos, até “marido”), um guerreiro jovem e impetuoso que acabou assumindo, na mitologia de Ugarit e da Fenícia (atual Líbano), o papel de comando que era de El.
Indícios dessa nova “personalidade” de Deus surgem no fato de que, pela primeira vez na narrativa bíblica, Javé é visto como um guerreiro, destruindo os “carros de guerra e cavaleiros” do Faraó e, mais tarde, guiando as tribos de Israel à vitória durante a conquista da terra de Canaã. Tal como Baal, Javé é descrita como “cavalgando as nuvens” e “trovejando”. E, mais importante ainda, uma série de textos bíblicos falam de Deus impondo sua vontade contra os mares impetuosos (como no caso do Mar Vermelho, em que as águas engolem o exército egípcio por ordem divina) ou derrotando monstros marinhos.
Há aí uma série de semelhanças com a mitologia cananéia sobre Baal, o qual derrotou em combate o deus-monstro marinho Yamm (o nome quer dizer simplesmente “mar” em hebraico) ou “o Rio” personificado. Na mitologia do Oriente Próximo, as águas marinhas eram vistas como símbolos do caos primitivo, e por isso tinham de ser derrotadas e domadas pelos deuses.
Javé também é associado à chuva e à fertilidade da terra pelos antigos autores bíblicos – atributos que aparecem entre as funções de Baal. Há, porém, uma diferença importante entre os dois deuses: outra narrativa de Ugarit fala do assassinato de Baal pelas mãos de Mot, o deus da morte, e da ressurreição do jovem guerreiro – provavelmente uma representação mítica do ciclo das estações do ano, essencial para a agricultura, já que Baal era um deus que abençoava a lavoura.
O lado guerreiro de Javé é talvez o mais difícil de aceitar para a sensibilidade moderna: quando os israelitas realizam a conquista da terra de Canaã, a ordem dada por Deus é de simplesmente exterminar todos os habitantes, e às vezes até os animais (embora, em alguns casos, os homens de Israel recebam permissão para transformar as mulheres do inimigo em concubinas).
Textos de outra nação da área, os moabitas (habitantes de Moab, a leste do Jordão) ajudam a lançar luz sobre esse costume aparentemente bárbaro. Um monumento de pedra conhecido como a estela de Mesa (nome de um rei de Moab em meados do século 9 a.C.) fala, ironicamente, de uma guerra de Mesa com Israel na qual o rei moabita, por ordem de seu deus, Chemosh, decreta o herem, ou “interdito”. E o herem nada mais é que a execução de todos os prisioneiros inimigos como um ato sagrado. Tratava-se, portanto, de um elemento cultural de toda a região.
Lado feminino
Se a “múltipla personalidade” de Javé pode ser basicamente descrita como uma combinação de El e Baal, há uma influência mais sutil, mas também perceptível, de um elemento feminino: a deusa da fertilidade Asherah, originalmente a esposa de Baal na mitologia cananéia. Normalmente, Deus se comporta de forma masculina na Bíblia, e a linguagem utilizada para falar de sua relação com os israelitas é, muitas vezes, a de um marido (Deus) e a esposa (o povo de Israel). Mas o livro bíblico dos Provérbios, bem como alguns outras fontes israelitas, apresenta a figura da Sabedoria personificada, uma espécie de “auxiliar” ou “primeira criatura” de Deus que o teria auxiliado na obra da criação do mundo.
Segundo o texto dos Provérbios, Deus “se deleita” com a Sabedoria e a usa para inspirar atos sábios nos seres humanos. Para muitos pesquisadores, a figura da Sabedoria incorpora aspectos da antiga Asherah na maneira como os antigos israelitas viam Deus, criando uma espécie de tensão: embora o próprio Deus não seja descrito como feminino, haveria uma complementaridade entre ele e sua principal auxiliar.
(Fonte: Reinaldo José Lopes / G1)
A afirmação pode soar desrespeitosa para judeus ou cristãos, mas não está muito longe da verdade: Javé, o Deus do Antigo Testamento, parece ter múltiplas personalidades. Para ser mais exato, especialistas que estudam os textos bíblicos, lêem antigas inscrições encontradas nos arredores de Israel ou escavam sítios arqueólogicos estão reconhecendo a influência conjunta de diversos deuses pagãos antigos no retrato de Javé traçado pela Bíblia.
A idéia não é demonstrar que o Deus bíblico não passa de mais um personagem da mitologia. Os pesquisadores querem apenas entender como elementos comuns à cultura do antigo Oriente Próximo, e principalmente da região onde hoje ficam o estado de Israel, os territórios palestinos, o Líbano e a Síria, contribuíram para as idéias que os antigos israelitas tinham sobre os seres divinos. As conclusões ainda são preliminares, mas há bons indícios de que Javé é uma fusão entre um deus idoso e paternal e um jovem deus guerreiro, com pitadas de outras divindades – uma delas do sexo feminino.
O ponto de partida dessas análises é o fundo cultural comum entre o antigo povo de Israel e seus vizinhos e adversários, os cananeus (moradores da terra de Canaã, como era chamada a região entre o rio Jordão e o mar Mediterrâneo em tempos antigos). A Bíblia retrata os israelitas como um povo quase totalmente distinto dos cananeus, mas os dados arqueólogicos revelam profundas semelhanças de língua, costumes e cultura material – a língua de Canaã, por exemplo, era só um dialeto um pouco diferente do hebraico bíblico.
Memórias de Ugarit
Os cananeus não deixaram para trás uma herança literária tão rica quanto a Bíblia. No entanto, poucos quilômetros ao norte de Canaã, na atual Síria, ficava a cidade-Estado de Ugarit, cuja língua e cultura eram praticamente idênticas às de seus primos do sul. Ugarit foi destruída por invasores bárbaros em 1200 a.C., mas os arqueólogos recuperaram numerosas inscrições da cidade, nas quais dá para entrever uma mitologia que apresenta semelhanças (e diferenças) impressionantes com as narrativas da Bíblia. “Por isso, Ugarit é uma parte importante do fundo cultural que, mais tarde, daria origem às tribos de Israel”, resume Christine Hayes, professora de estudos clássicos judaicos da Universidade Yale (EUA).
Uma das figuras mais proeminentes nesses textos é El – nome que quer dizer simplesmente “deus” nas antigas línguas da região, mas que também se refere a uma divindade específica, o patriarca, ou chefe de família, dos deuses. “Patriarca” é a palavra-chave: o El de Ugarit tem paralelos muito específicos com a figura de Deus durante o período patriarcal, retratado no livro do Gênesis e personificado pelos ancestrais dos israelitas: Abraão, Isaac e Jacó.
Nesses textos da Bíblia há, por exemplo, referências a El Shadday (literalmente “El da Montanha”, embora a expressão normalmente seja traduzida como “Deus Todo-Poderoso”), El Elyon (“Deus Altíssimo”) e El Olam (“Deus Eterno”). O curioso é que, na mitologia ugarítica, El também é imaginado vivendo no alto de uma montanha e visto como um ancião sábio, de vida eterna.
Tal como os patriarcas bíblicos, El é uma espécie de nômade, vivendo numa versão divina da tenda dos beduínos; e, mais importante ainda, El tem uma relação especial com os chefes dos clãs, tal como Abraão, Isaac e Jacó: eles os protege e lhes promete uma descendência numerosa. Ora, a maior parte do livro do Gênesis é o relato da amizade de Deus com os patriarcas israelitas, guiando suas migrações e fazendo a promessa solene de transformar a descendência deles num povo “mais numeroso que as estrelas do céu”.
Israel ou “Israías”?
Outros dados, mais circunstanciais, traçam outros elos entre o Deus do Gênesis e El: num dos trechos aparentemente mais antigos do livro bíblico, Deus é chamado pelo epíteto poético de “Touro de Jacó” (frase às vezes traduzida como “Poderoso de Jacó”), enquanto a mitologia ugarítica compara El freqüentemente a um touro. Finalmente, o próprio nome do povo escolhido – Israel, originalmente dado como alcunha ao patriarca Jacó – carrega o elemento “-el”, lembra Airton José da Silva, professor de Antigo Testamento do Centro de Estudos da Arquidiocese de Ribeirão Preto (SP).
“É o nome do deus cananeu, mais um indício de que Israel surge dentro de Canaã, por um processo gradual”, diz Silva. Ele argumenta que, se Javé fosse desde sempre a divindade dos israelitas, o nome desse povo seria “Israías”. Isso porque o elemento adaptado como “-ías” em português (algo como -yahu) era, em hebraico, uma forma contrata do nome “Javé”. Curiosamente, o elemento se torna dominante nos chamados nomes teofóricos (ligados a uma divindade) dados a israelitas no período da monarquia, a partir dos séculos 10 a.C. e 9 a.C.
E esse nome (provavelmente Yahweh em hebraico; a sonoridade original foi obscurecida pelo costume de não pronunciar a palavra por respeito) é um enigma e tanto. As tradições bíblicas são um tanto contraditórias, mas pelo menos uma fonte das Escrituras afirma que Javé só deu a conhecer seu verdadeiro nome aos israelitas quando convocou Moisés para ser seu profeta e arrancar os descendentes de Jacó da escravidão no Egito. (A Moisés, Deus diz que apareceu a Abraão, Isaac e Jacó como “El Shadday”.) O problema é que ninguém sabe qual a origem de Javé, o qual nunca parece ter sido uma divindade cananéia, exatamente como diz o autor bíblico.
Senhor do deserto
A esmagadora maioria dos arqueólogos e historiadores modernos não coloca suas fichas no Êxodo maciço de 600 mil israelitas (sem contar mulheres e crianças) do Egito, por dois motivos: a semelhança entre Israel e os cananeus e a falta de qualquer indício direto da fuga. Mas muitos supõem que um pequeno componente dos grupos que se juntaram para formar a nação israelita tenha sido formado por adoradores de Javé, que acabaram popularizando o culto. Quem seriam esses primeiros javistas? Uma pista pode vir de alguns documentos egípcios, que os chamam de Shasu – algo como “nômades” ou “beduínos”.
“Duas ou três inscrições egípcias mencionam um lugar chamado 'Yhwh dos Shasu', o que, para alguns especialistas, parece ser 'Javé dos Shasu'. Talvez sim, talvez não. Não temos como saber ao certo”, diz Mark S. Smith, pesquisador da Universidade de Nova York e autor do livro “The Early History of God” (“A História Antiga de Deus”, ainda sem tradução para o português).
“É menos provável que o culto a Javé venha de dentro da Palestina e da Síria, e um pouco mais plausível que ele tenha se originado em certas regiões da Arábia”, diz Airton da Silva. Mark Smith lembra que algumas das passagens poéticas consideradas as mais antigas da Bíblia – nos livros dos Juízes e nos Salmos, por exemplo – referem-se ao “lar” de Javé em locais denominados “Teiman” ou “Paran”. Aparentemente, são áreas desérticas, apropriadas para a vida de nomadismo. “Muitos especialistas localizam essa região no que seria o noroeste da atual Arábia Saudita, ao sul da antiga Judá [parte mais meridional dos territórios israelitas]”, diz Smith.
Guerreiro divino
Seja como for, quando Javé entra em cena com seu “nome oficial” durante o Êxodo bíblico, a impressão que se tem é que ele já absorveu boa parte das características de um outro deus cananeu: Baal (literalmente “senhor”, “mestre” e, em certos contextos, até “marido”), um guerreiro jovem e impetuoso que acabou assumindo, na mitologia de Ugarit e da Fenícia (atual Líbano), o papel de comando que era de El.
Indícios dessa nova “personalidade” de Deus surgem no fato de que, pela primeira vez na narrativa bíblica, Javé é visto como um guerreiro, destruindo os “carros de guerra e cavaleiros” do Faraó e, mais tarde, guiando as tribos de Israel à vitória durante a conquista da terra de Canaã. Tal como Baal, Javé é descrita como “cavalgando as nuvens” e “trovejando”. E, mais importante ainda, uma série de textos bíblicos falam de Deus impondo sua vontade contra os mares impetuosos (como no caso do Mar Vermelho, em que as águas engolem o exército egípcio por ordem divina) ou derrotando monstros marinhos.
Há aí uma série de semelhanças com a mitologia cananéia sobre Baal, o qual derrotou em combate o deus-monstro marinho Yamm (o nome quer dizer simplesmente “mar” em hebraico) ou “o Rio” personificado. Na mitologia do Oriente Próximo, as águas marinhas eram vistas como símbolos do caos primitivo, e por isso tinham de ser derrotadas e domadas pelos deuses.
Javé também é associado à chuva e à fertilidade da terra pelos antigos autores bíblicos – atributos que aparecem entre as funções de Baal. Há, porém, uma diferença importante entre os dois deuses: outra narrativa de Ugarit fala do assassinato de Baal pelas mãos de Mot, o deus da morte, e da ressurreição do jovem guerreiro – provavelmente uma representação mítica do ciclo das estações do ano, essencial para a agricultura, já que Baal era um deus que abençoava a lavoura.
O lado guerreiro de Javé é talvez o mais difícil de aceitar para a sensibilidade moderna: quando os israelitas realizam a conquista da terra de Canaã, a ordem dada por Deus é de simplesmente exterminar todos os habitantes, e às vezes até os animais (embora, em alguns casos, os homens de Israel recebam permissão para transformar as mulheres do inimigo em concubinas).
Textos de outra nação da área, os moabitas (habitantes de Moab, a leste do Jordão) ajudam a lançar luz sobre esse costume aparentemente bárbaro. Um monumento de pedra conhecido como a estela de Mesa (nome de um rei de Moab em meados do século 9 a.C.) fala, ironicamente, de uma guerra de Mesa com Israel na qual o rei moabita, por ordem de seu deus, Chemosh, decreta o herem, ou “interdito”. E o herem nada mais é que a execução de todos os prisioneiros inimigos como um ato sagrado. Tratava-se, portanto, de um elemento cultural de toda a região.
Lado feminino
Se a “múltipla personalidade” de Javé pode ser basicamente descrita como uma combinação de El e Baal, há uma influência mais sutil, mas também perceptível, de um elemento feminino: a deusa da fertilidade Asherah, originalmente a esposa de Baal na mitologia cananéia. Normalmente, Deus se comporta de forma masculina na Bíblia, e a linguagem utilizada para falar de sua relação com os israelitas é, muitas vezes, a de um marido (Deus) e a esposa (o povo de Israel). Mas o livro bíblico dos Provérbios, bem como alguns outras fontes israelitas, apresenta a figura da Sabedoria personificada, uma espécie de “auxiliar” ou “primeira criatura” de Deus que o teria auxiliado na obra da criação do mundo.
Segundo o texto dos Provérbios, Deus “se deleita” com a Sabedoria e a usa para inspirar atos sábios nos seres humanos. Para muitos pesquisadores, a figura da Sabedoria incorpora aspectos da antiga Asherah na maneira como os antigos israelitas viam Deus, criando uma espécie de tensão: embora o próprio Deus não seja descrito como feminino, haveria uma complementaridade entre ele e sua principal auxiliar.
(Fonte: Reinaldo José Lopes / G1)
sábado, julho 19, 2008
La petite histoire des matières premières (5/10)
Le Temps (Genève)
La chute de «Doigts de cuivre»
METAUX NON FERREUX. Le parcours du trader Yasuo Hamanaka anticipe celui de Jérôme Kerviel.
Jean-Claude Péclet
Jusqu'à l'arrestation de Jérôme Kerviel en janvier 2008, le record de la plus grande débâcle financière provoquée par un seul homme était détenu par Yasuo Hamanaka. Ce trader de la banque Sumimoto était surnommé «Doigts de cuivre» ou «Monsieur cinq pour cent» en référence à la part mondiale du métal rouge qu'il contrôlait au sommet de sa gloire.
Quand, le 5 juin 1996, il confessa finalement avoir perdu d'énormes montants dans des opérations parallèles et cachées, l'ampleur du désastre fut chiffrée à 1,6 milliard de dollars. Au final, la facture a gonflé à 2,8 milliards de dollars et n'a pas été payée que par Sumimoto. JP Morgan, Merrill Lynch ou UBS (pour 85 millions de dollars) sont également passés à la caisse.
Combien Hamanaka avait-il gagné avant? On ne le saura jamais. Certains affirment qu'il avait pu amasser 20 milliards de dollars dans les belles années. Yasuo Hamanaka était une star, ses propos concernant le marché du cuivre étaient parole d'évangile. Sa méthode, en fait, était simple: à travers les positions accumulées par Sumimoto, le trader disposait d'une masse critique suffisante pour manipuler le marché. Il accentuait la rareté dans les périodes où se dessinait une pénurie pour maintenir des prix artificiellement hauts.
Motivé par la peur
Le mystère est qu'il ait pu agir si longtemps sans provoquer aucune réaction de ses supérieurs. Comme Jérôme Kerviel, Yasuo Hamanaka était un malade du travail, qui passait ses ordres parallèles à 3 heures du matin sur les bourses occidentales. Il avait bien un compte en Suisse et entretenait une coûteuse maîtresse, mais pour le reste vivait plutôt modestement avec sa femme, ses deux enfants et son chien dans une banlieue de Kawasaki. Le journaliste Eiichiro Tokumoto, qui lui a consacré un roman à clés (Squeeze) après s'être fait prendre aux prédictions du «gourou», pense que le motif principal de ses actes était la peur - crainte d'être découvert, d'avoir à justifier les premières pertes.
Cette peur habitait aussi ses supérieurs, que personne n'a crus quand ils affirmaient ne pas être au courant des manipulations ou niaient les avoir couvertes. En 1993 déjà, des variations de prix inexplicables sur le marché du cuivre avaient fait de nombreuses victimes, dont la société chilienne Codelco, premier producteur mondial de cuivre. A ce moment, les regards s'étaient déjà tournés vers Yasuo Hamanaka, sans résultat. La banque Sumimoto avait pourtant des règles internes interdisant les manœuvres spéculatives sur les marchés mais - autre parallèle avec l'affaire Kerviel/Société Générale - ne les a pas appliquées, trop contente de jouer dans la cour des grands grâce aux exploits de son trader.
Il a fallu que l'office anti-fraude britannique puis l'organe de contrôle américain (CFTC) commencent à enquêter sur le marché du cuivre au début de l'année 1996 pour que Sumimoto mène sa propre enquête. En mai, les rumeurs ont commencé à circuler sur la mise à l'écart de Yasuo Hamanaka. En quatre jours, le cours du cuivre perdait 15%. Il baissa encore de quelque 2300 dollars la tonne à 1500 dollars la tonne et resta à ce plancher pendant plusieurs années.
En mai 2008, la tonne se négociait à 8400 dollars.
Fiche signalétique: le cuivre
Jean-Claude Péclet
Le premier producteur mondial de cuivre est aujourd'hui la Chine (3,5 millions de tonnes sur un total de 17,7 millions), alors qu'en 2005 c'était encore le Chili.
Mais, historiquement, le premier producteur connu fut l'île de Chypre, d'où le mot «cuivre» tire son origine (aes cyprium, puis cuprum). C'est un des plus anciens métaux utilisés par l'homme, les premiers objets trouvés remontant à 8700 ans avant J.-C. C'est aussi un des rares qui existe à l'état natif, bien qu'on le trouve plus souvent sous forme de sulfure ou de sulfo-sel. Il offre une bonne conductivité électrique - d'où son utilisation dans les câbles - et thermique.
A faible dose, le cuivre est aussi un oligo-élément indispensable à la vie. Chez l'homme, il intervient dans la fonction immunitaire et contre le stress oxydant. Ses propriétés antiinfectieuses étaient déjà utilisées dans l'Egypte antique. A plus forte dose, il peut devenir un puissant poison. Le cuivre est couramment utilisé dans les alliages (laiton, bronze). Il est associé à la planète Vénus, à la féminité, à la jeunesse et à l'amour.
La chute de «Doigts de cuivre»
METAUX NON FERREUX. Le parcours du trader Yasuo Hamanaka anticipe celui de Jérôme Kerviel.
Jean-Claude Péclet
Jusqu'à l'arrestation de Jérôme Kerviel en janvier 2008, le record de la plus grande débâcle financière provoquée par un seul homme était détenu par Yasuo Hamanaka. Ce trader de la banque Sumimoto était surnommé «Doigts de cuivre» ou «Monsieur cinq pour cent» en référence à la part mondiale du métal rouge qu'il contrôlait au sommet de sa gloire.
Quand, le 5 juin 1996, il confessa finalement avoir perdu d'énormes montants dans des opérations parallèles et cachées, l'ampleur du désastre fut chiffrée à 1,6 milliard de dollars. Au final, la facture a gonflé à 2,8 milliards de dollars et n'a pas été payée que par Sumimoto. JP Morgan, Merrill Lynch ou UBS (pour 85 millions de dollars) sont également passés à la caisse.
Combien Hamanaka avait-il gagné avant? On ne le saura jamais. Certains affirment qu'il avait pu amasser 20 milliards de dollars dans les belles années. Yasuo Hamanaka était une star, ses propos concernant le marché du cuivre étaient parole d'évangile. Sa méthode, en fait, était simple: à travers les positions accumulées par Sumimoto, le trader disposait d'une masse critique suffisante pour manipuler le marché. Il accentuait la rareté dans les périodes où se dessinait une pénurie pour maintenir des prix artificiellement hauts.
Motivé par la peur
Le mystère est qu'il ait pu agir si longtemps sans provoquer aucune réaction de ses supérieurs. Comme Jérôme Kerviel, Yasuo Hamanaka était un malade du travail, qui passait ses ordres parallèles à 3 heures du matin sur les bourses occidentales. Il avait bien un compte en Suisse et entretenait une coûteuse maîtresse, mais pour le reste vivait plutôt modestement avec sa femme, ses deux enfants et son chien dans une banlieue de Kawasaki. Le journaliste Eiichiro Tokumoto, qui lui a consacré un roman à clés (Squeeze) après s'être fait prendre aux prédictions du «gourou», pense que le motif principal de ses actes était la peur - crainte d'être découvert, d'avoir à justifier les premières pertes.
Cette peur habitait aussi ses supérieurs, que personne n'a crus quand ils affirmaient ne pas être au courant des manipulations ou niaient les avoir couvertes. En 1993 déjà, des variations de prix inexplicables sur le marché du cuivre avaient fait de nombreuses victimes, dont la société chilienne Codelco, premier producteur mondial de cuivre. A ce moment, les regards s'étaient déjà tournés vers Yasuo Hamanaka, sans résultat. La banque Sumimoto avait pourtant des règles internes interdisant les manœuvres spéculatives sur les marchés mais - autre parallèle avec l'affaire Kerviel/Société Générale - ne les a pas appliquées, trop contente de jouer dans la cour des grands grâce aux exploits de son trader.
Il a fallu que l'office anti-fraude britannique puis l'organe de contrôle américain (CFTC) commencent à enquêter sur le marché du cuivre au début de l'année 1996 pour que Sumimoto mène sa propre enquête. En mai, les rumeurs ont commencé à circuler sur la mise à l'écart de Yasuo Hamanaka. En quatre jours, le cours du cuivre perdait 15%. Il baissa encore de quelque 2300 dollars la tonne à 1500 dollars la tonne et resta à ce plancher pendant plusieurs années.
En mai 2008, la tonne se négociait à 8400 dollars.
Fiche signalétique: le cuivre
Jean-Claude Péclet
Le premier producteur mondial de cuivre est aujourd'hui la Chine (3,5 millions de tonnes sur un total de 17,7 millions), alors qu'en 2005 c'était encore le Chili.
Mais, historiquement, le premier producteur connu fut l'île de Chypre, d'où le mot «cuivre» tire son origine (aes cyprium, puis cuprum). C'est un des plus anciens métaux utilisés par l'homme, les premiers objets trouvés remontant à 8700 ans avant J.-C. C'est aussi un des rares qui existe à l'état natif, bien qu'on le trouve plus souvent sous forme de sulfure ou de sulfo-sel. Il offre une bonne conductivité électrique - d'où son utilisation dans les câbles - et thermique.
A faible dose, le cuivre est aussi un oligo-élément indispensable à la vie. Chez l'homme, il intervient dans la fonction immunitaire et contre le stress oxydant. Ses propriétés antiinfectieuses étaient déjà utilisées dans l'Egypte antique. A plus forte dose, il peut devenir un puissant poison. Le cuivre est couramment utilisé dans les alliages (laiton, bronze). Il est associé à la planète Vénus, à la féminité, à la jeunesse et à l'amour.
sexta-feira, julho 18, 2008
Indice de hoje
- Estudo diz que água era abundante em Marte há bilhões de anos (Folha de S. Paulo, Brasil)
- Le cerveau dans tous ses états (5/5) - Où le cerveau nous cache-t-il? (Le Temps, Genève)
- La petite histoire des matières premières (4/10) (Le Temps, Genève)
- Le cerveau dans tous ses états (5/5) - Où le cerveau nous cache-t-il? (Le Temps, Genève)
- La petite histoire des matières premières (4/10) (Le Temps, Genève)
Estudo diz que água era abundante em Marte há bilhões de anos
Folha de S. Paulo (Brasil)
A água foi um elemento abundante no primeiro período geológico de Marte, entre 4,6 bilhões e 3,8 bilhões de anos atrás, quando foi determinante para a formação de minerais tanto na superfície como no subsolo do Planeta Vermelho. A informação é de um estudo publicado na revista britânica "Nature", com análises de dados da sonda Mars Reconnaissance Orbiter.
Vastas regiões de Marte foram ricas em água durante o período Noachian, uma época em que houve processos hidrológicos dominantes em toda a crosta marciana, em até cinco quilômetros de profundidade.
Os minerais que estiveram em contato com a água são os que permitiram aos cientistas compreenderem que Marte não era um "caldeirão a ponto de ebulição", mas um lugar que pode ter abrigado vida microorgânica. Esses minerais são os filosilicatos, um tipo de argila encontrada nos restos do período Noachian das regiões montanhosas do sul do planeta e que preservaram o rastro da interação com a água.
A formação dos filosilicatos, ou silicatos hidratados, precisou de uma elevada ação de água e um ambiente de ph de moderado a alto.
Além disso, os cientistas afirmam que a temperatura em que se formaram foi baixa, de 100 ºC a 200 ºC, algo que mantém aberta a possibilidade de que a vida de microorganismos tenha sido uma realidade em Marte.
Um mapa do planeta vermelho indica que há regiões ricas nestes minerais, embora se limitem a terrenos antigos e a uma pequena gama de elementos, como ferro, magnésio e esmectitas de alumínio.
As camadas da Nili Fossae --uma das fossas de Marte-- mostram camadas do mineral olivina acima destes filosilicatos, o que indica o momento da cessação da atividade hidrológica antes da formação vulcânica da olivina.
A Mars Reconnaissance Orbiter documentou centenas de mostras de filosilicatos de ferro e magnésio em conchas, ejeções e cimos de crateras do sul do planeta. Além disso, esses minerais foram encontrados em depósitos sedimentários claramente transportados pela água.
Mais especificamente, na cratera Jezero foram descobertos dois deltas e os cientistas asseguram que existiu um lago de grandes dimensões e correntes aquáticas de 15 mil quilômetros quadrados.
Devido à abundância de água e ao transporte de sedimentos, os pesquisadores afirmam que, se existiu a vida marciana, os deltas foram o lugar adequado para seu desenvolvimento.
A água foi um elemento abundante no primeiro período geológico de Marte, entre 4,6 bilhões e 3,8 bilhões de anos atrás, quando foi determinante para a formação de minerais tanto na superfície como no subsolo do Planeta Vermelho. A informação é de um estudo publicado na revista britânica "Nature", com análises de dados da sonda Mars Reconnaissance Orbiter.
Vastas regiões de Marte foram ricas em água durante o período Noachian, uma época em que houve processos hidrológicos dominantes em toda a crosta marciana, em até cinco quilômetros de profundidade.
Os minerais que estiveram em contato com a água são os que permitiram aos cientistas compreenderem que Marte não era um "caldeirão a ponto de ebulição", mas um lugar que pode ter abrigado vida microorgânica. Esses minerais são os filosilicatos, um tipo de argila encontrada nos restos do período Noachian das regiões montanhosas do sul do planeta e que preservaram o rastro da interação com a água.
A formação dos filosilicatos, ou silicatos hidratados, precisou de uma elevada ação de água e um ambiente de ph de moderado a alto.
Além disso, os cientistas afirmam que a temperatura em que se formaram foi baixa, de 100 ºC a 200 ºC, algo que mantém aberta a possibilidade de que a vida de microorganismos tenha sido uma realidade em Marte.
Um mapa do planeta vermelho indica que há regiões ricas nestes minerais, embora se limitem a terrenos antigos e a uma pequena gama de elementos, como ferro, magnésio e esmectitas de alumínio.
As camadas da Nili Fossae --uma das fossas de Marte-- mostram camadas do mineral olivina acima destes filosilicatos, o que indica o momento da cessação da atividade hidrológica antes da formação vulcânica da olivina.
A Mars Reconnaissance Orbiter documentou centenas de mostras de filosilicatos de ferro e magnésio em conchas, ejeções e cimos de crateras do sul do planeta. Além disso, esses minerais foram encontrados em depósitos sedimentários claramente transportados pela água.
Mais especificamente, na cratera Jezero foram descobertos dois deltas e os cientistas asseguram que existiu um lago de grandes dimensões e correntes aquáticas de 15 mil quilômetros quadrados.
Devido à abundância de água e ao transporte de sedimentos, os pesquisadores afirmam que, se existiu a vida marciana, os deltas foram o lugar adequado para seu desenvolvimento.
Le cerveau dans tous ses états (5/5) - Où le cerveau nous cache-t-il?
Le Temps (Genève)
por Jean-Luc Vonnez
Le 2 juin 2005, une équipe américano-suisse publie dans la revue Nature une expérience aussi simple que retentissante. Les auteurs, des économistes et neuropsychologues de l'Université de Zurich et du Center for Neuroeconomics Studies en Californie, ont proposé à une soixantaine de sujets - des étudiants de l'EPF de Zurich - de jouer à un jeu d'investissement faisant appel à la confiance. Une partie d'entre eux ont reçu un traitement d'ocytocine sous forme de spray nasal, les autres un placebo. Résultat étonnant: les volontaires qui inhalaient cette hormone sécrétée naturellement par l'hypophyse (glande du cerveau) confient davantage de capital à des inconnus que les autres. Leur propension à faire confiance est augmentée.
Trois ans plus tard, la découverte est entrée dans l'histoire. Paul Zak, l'un des économistes de l'équipe, en fait un long récit dans le Scientific American de juin 2008. Ernst Fehr, professeur à l'Université de Zurich, et coauteur de l'article, poursuit l'étude du phénomène. En mai, son équipe a montré dans la revue Neuron que l'ocytocine module non seulement la capacité à faire confiance, mais diminue aussi la méfiance induite lorsque la confiance accordée est déçue. Grâce à l'imagerie fonctionnelle, les chercheurs ont pu associer cette tolérance à la trahison à une diminution de l'activité de l'amygdale et du mésencéphale, des régions connues pour moduler la peur.
Cette exploration du rôle de l'ocytocine illustre bien la façon dont les neurosciences abordent, par petits pas modestes, le grand mystère des fonctions supérieures du cerveau. Plusieurs équipes dans le monde s'attaquent de front à la question de la conscience de soi. En janvier 2006, la revue Pour la Science tentait une synthèse des travaux de cette «neurobiologie du soi». L'un des modèles émergents suppose que la conscience de soi naît de la nécessité, pour le cerveau, de distinguer nettement les sensations qui sont la conséquence des mouvements volontaires de celles qui sont attribuables à des phénomènes extérieurs.
Cette distinction s'opérerait par comparaison entre les sensations effectives et une prédiction des sensations attendues. Jusque dans les circuits neuronaux élémentaires de la perception serait établie une distinction entre ce qui provient de soi et ce qui concerne le monde extérieur. De cette distinction systématique naîtrait la conscience.
A l'appui de ce modèle, plusieurs expériences montrent que le cerveau active les mêmes zones lorsque le sujet se trouve dans une situation donnée et lorsqu'il observe un tiers dans la même situation. Une région du cerveau, l'insula, serait responsable de l'attribution à ces activations indifférenciées le caractère de soi, ou alors un caractère extérieur.
Des expériences menées à l'EPF de Lausanne par l'équipe d'Olaf Blanke explorent également la perception de soi. En août 2007, le chercheur a publié dans Science une expérience au cours de laquelle des volontaires sont placés devant une image virtuelle d'eux-mêmes en train de recevoir les mêmes stimuli tactiles qu'eux. La suite de l'expérience montre que la perception que les sujets ont de leur position dans l'espace est perturbée par la présence, devant eux, de leur double virtuel, auquel ils ont tendance à s'identifier. Par cette mise en situation habile, les scientifiques sont parvenus à manipuler le système de perception de soi. Un phénomène comparable pourrait expliquer les expériences de décorporation vécues par des victimes d'accidents graves.
D'autres groupes, mentionnés par Pour la Science, tentent de démontrer l'existence dans le cerveau d'un réseau de la conscience de soi qui comprendrait le cortex préfrontal médian, une zone qui s'active lorsque des sujets écoutent des adjectifs qui leur correspondent ou des mots en lien avec leur identité professionnelle. Un chercheur de l'Université de Californie a même entrepris de suivre à long terme un groupe d'enfants dans l'espoir d'observer les changements dans l'activité cérébrale qui accompagneraient le développement de leur conscience d'eux-mêmes.
Mais tous ces travaux restent très descriptifs. Pierre Magistretti, professeur en neurobiologie à l'EPFL et à l'Université de Lausanne, à côté de ses recherches sur le métabolisme des cellules nerveuses, s'intéresse depuis plusieurs années aux conséquences des découvertes récentes au sujet des mécanismes élémentaires de fonctionnement du cerveau. Il a notamment publié en 2004, avec le psychiatre François Ansermet, un ouvrage* qui explore les nouveaux ponts qu'il est possible de jeter entre la psychiatrie et les neurosciences.
Titulaire cette année de la chaire internationale du Collège de France, il cherche à encourager un dialogue nouveau entre ces deux disciplines. Le 27 mai dernier, il a organisé à Paris une rencontre entre psychiatres et neurobiologistes. La démarche n'est pas passée inaperçue: «L'auditoire Marguerite de Navarre était plein. Les médias se sont montrés intéressés.» Une petite révolution au pays des chapelles psychanalytiques.
A l'origine de cette démarche, la révolution déclenchée dans les années 1970 par la découverte de la plasticité neuronale. Le cerveau, qu'on croyait câblé une fois pour toutes à la fin du développement, se révélait en perpétuelle évolution, constamment en train de modifier le réseau des synapses, ces points de contact et de communication entre les neurones. Pierre Magistretti et François Ansermet montrent dans leur premier livre que ce phénomène de plasticité synaptique permet de voir le cerveau comme lentement façonné par l'expérience individuelle. Ce cerveau modelé par la vie, porteur des traces de l'expérience, correspond étrangement aux concepts empiriques de la psychanalyse.
Quoi de neuf depuis? «Nous écrivons un nouveau livre, dit Pierre Magistretti. Nous avions abordé dans le premier la façon dont les traces de l'expérience s'inscrivent dans le cerveau grâce à la plasticité synaptique. Dans le second, nous nous interrogeons sur les fonctions possibles de ces traces, au-delà de l'apprentissage et de l'adaptation.» Cette réflexion est nourrie par des travaux récents sur les modifications synaptiques induites chez le rongeur lors d'expériences d'apprentissage et de réexposition à des situations connues.
«La trace synaptique laissée par une expérience donnée est réactivée lorsque l'individu - ou l'animal - est placé dans un contexte comparable, explique Pierre Magistretti. Or cette réactivation ne conduit pas forcément au renforcement de la trace, comme on pouvait le supposer. Au contraire, celle-ci devient labile une fois réactivée. Elle peut perdre son lien avec l'expérience initiale, se réassocier à d'autres traces. Ce phénomène, appelé reconsolidation, joue un rôle très important dans le cerveau.»
Ces observations ont des conséquences fondamentales. «La réassociation continuelle des traces de l'expérience pourrait expliquer la constitution progressive d'une mémoire dissociée de ses circonstances d'apparition, devenue inaccessible, qui pourrait correspondre à l'inconscient de la psychanalyse, poursuit Pierre Magistretti. Il est frappant de constater que le contenu de l'inconscient, comme celui des rêves, se caractérise précisément par une absence d'inscription dans le temps ou dans l'espace de l'expérience.»
Reste à savoir quelle est la fonction de cette reconsolidation. Quel avantage peut bien procurer le mélange inextricable des traces de l'expérience? «Si la continuité entre l'expérience et ses traces était totalement linéaire, nous serions des êtres terriblement prévisibles, dit Pierre Magistretti. Or, la réassociation de traces vient bouleverser ce déterminisme. Elle crée une discontinuité entre l'expérience et ses traces synaptiques. Tout se passe comme si nous étions déterminés à ne pas être déterminés. A partir d'une expérience donnée, grâce à la réassociation des traces qui se produit durant la reconsolidation, nous construisons une identité singulière.»
Ce qui amène le scientifique à s'interroger sur notre vision du cerveau: «Les neurosciences cognitives ont beaucoup apporté à notre compréhension du fonctionnement cérébral. L'imagerie fonctionnelle permet d'identifier les zones du cerveau qui sont activées par des tâches cognitives ou des situations émotionnellement chargées. Le risque serait toutefois de glisser vers une vision mécaniste du cerveau. Or ce qui fait toute la richesse de l'humain, c'est probablement cette capacité à réassocier sans fin les traces de l'expérience, au point de constituer une réalité interne inconsciente - ou mieux, non connue, «unbewusst» comme la définissait Freud - qui nous affranchit du déterminisme et ouvre la possibilité de l'inattendu, de la créativité.»
*«A chacun son cerveau», Pierre Magistretti et François Ansermet, Ed. Odile Jacob (2004).
Hémisphère culturel Briser les chaînes de la causalité
Laurent Wolf
Le développement des sciences cognitives provoque aujourd'hui chez les artistes des interrogations analogues à celles que provoquaient, dans les années 1910-1920, les développements de la psychologie expérimentale et de la psychanalyse. La connaissance de plus en plus précise des processus matériels de la pensée et de la créativité finirait-elle par infirmer la croyance dans les possibilités de la création et de l'invention artistique? Depuis près d'un siècle, les artistes mettent en œuvre des dispositifs destinés à enrayer les déterminismes: assemblages d'objets et collages, utilisation du hasard, mise en condition physique ou psychique, etc.; comme, au début des années 1920, l'écriture automatique et les cadavres exquis des surréalistes.
L'écriture automatique, qui doit essentiellement à la lecture de Freud par André Breton, repose sur l'hypothèse qu'il est possible de faire apparaître un niveau de créativité subconscient ou inconscient par une discipline d'énonciation (écrite) qui fait perdre le contrôle au locuteur. Il s'agit de laisser filer la plume. Breton et Philippe Soupault le font pour la première fois dans Champs magnétiques (1920). L'écriture automatique, qui s'apparente à l'association libre et au rêve éveillé, est à la fois un médium poétique et un moyen de se connaître pour développer ensuite une création débarrassée du refoulement.
Les cadavres exquis, que les surréalistes pratiquaient à partir du milieu des années 1920, ont un but analogue. Ils utilisent la créativité collective. Les protagonistes du jeu (ou de l'expérience) composent des poèmes ou des dessins par fragments successifs, sans connaître ce qui précède. Des schémas et des modèles imprévus apparaissent, qui peuvent être ensuite repris au cours d'une création consciente, comme le fait Max Ernst dans ses collages (ci-dessus).
por Jean-Luc Vonnez
Le 2 juin 2005, une équipe américano-suisse publie dans la revue Nature une expérience aussi simple que retentissante. Les auteurs, des économistes et neuropsychologues de l'Université de Zurich et du Center for Neuroeconomics Studies en Californie, ont proposé à une soixantaine de sujets - des étudiants de l'EPF de Zurich - de jouer à un jeu d'investissement faisant appel à la confiance. Une partie d'entre eux ont reçu un traitement d'ocytocine sous forme de spray nasal, les autres un placebo. Résultat étonnant: les volontaires qui inhalaient cette hormone sécrétée naturellement par l'hypophyse (glande du cerveau) confient davantage de capital à des inconnus que les autres. Leur propension à faire confiance est augmentée.
Trois ans plus tard, la découverte est entrée dans l'histoire. Paul Zak, l'un des économistes de l'équipe, en fait un long récit dans le Scientific American de juin 2008. Ernst Fehr, professeur à l'Université de Zurich, et coauteur de l'article, poursuit l'étude du phénomène. En mai, son équipe a montré dans la revue Neuron que l'ocytocine module non seulement la capacité à faire confiance, mais diminue aussi la méfiance induite lorsque la confiance accordée est déçue. Grâce à l'imagerie fonctionnelle, les chercheurs ont pu associer cette tolérance à la trahison à une diminution de l'activité de l'amygdale et du mésencéphale, des régions connues pour moduler la peur.
Cette exploration du rôle de l'ocytocine illustre bien la façon dont les neurosciences abordent, par petits pas modestes, le grand mystère des fonctions supérieures du cerveau. Plusieurs équipes dans le monde s'attaquent de front à la question de la conscience de soi. En janvier 2006, la revue Pour la Science tentait une synthèse des travaux de cette «neurobiologie du soi». L'un des modèles émergents suppose que la conscience de soi naît de la nécessité, pour le cerveau, de distinguer nettement les sensations qui sont la conséquence des mouvements volontaires de celles qui sont attribuables à des phénomènes extérieurs.
Cette distinction s'opérerait par comparaison entre les sensations effectives et une prédiction des sensations attendues. Jusque dans les circuits neuronaux élémentaires de la perception serait établie une distinction entre ce qui provient de soi et ce qui concerne le monde extérieur. De cette distinction systématique naîtrait la conscience.
A l'appui de ce modèle, plusieurs expériences montrent que le cerveau active les mêmes zones lorsque le sujet se trouve dans une situation donnée et lorsqu'il observe un tiers dans la même situation. Une région du cerveau, l'insula, serait responsable de l'attribution à ces activations indifférenciées le caractère de soi, ou alors un caractère extérieur.
Des expériences menées à l'EPF de Lausanne par l'équipe d'Olaf Blanke explorent également la perception de soi. En août 2007, le chercheur a publié dans Science une expérience au cours de laquelle des volontaires sont placés devant une image virtuelle d'eux-mêmes en train de recevoir les mêmes stimuli tactiles qu'eux. La suite de l'expérience montre que la perception que les sujets ont de leur position dans l'espace est perturbée par la présence, devant eux, de leur double virtuel, auquel ils ont tendance à s'identifier. Par cette mise en situation habile, les scientifiques sont parvenus à manipuler le système de perception de soi. Un phénomène comparable pourrait expliquer les expériences de décorporation vécues par des victimes d'accidents graves.
D'autres groupes, mentionnés par Pour la Science, tentent de démontrer l'existence dans le cerveau d'un réseau de la conscience de soi qui comprendrait le cortex préfrontal médian, une zone qui s'active lorsque des sujets écoutent des adjectifs qui leur correspondent ou des mots en lien avec leur identité professionnelle. Un chercheur de l'Université de Californie a même entrepris de suivre à long terme un groupe d'enfants dans l'espoir d'observer les changements dans l'activité cérébrale qui accompagneraient le développement de leur conscience d'eux-mêmes.
Mais tous ces travaux restent très descriptifs. Pierre Magistretti, professeur en neurobiologie à l'EPFL et à l'Université de Lausanne, à côté de ses recherches sur le métabolisme des cellules nerveuses, s'intéresse depuis plusieurs années aux conséquences des découvertes récentes au sujet des mécanismes élémentaires de fonctionnement du cerveau. Il a notamment publié en 2004, avec le psychiatre François Ansermet, un ouvrage* qui explore les nouveaux ponts qu'il est possible de jeter entre la psychiatrie et les neurosciences.
Titulaire cette année de la chaire internationale du Collège de France, il cherche à encourager un dialogue nouveau entre ces deux disciplines. Le 27 mai dernier, il a organisé à Paris une rencontre entre psychiatres et neurobiologistes. La démarche n'est pas passée inaperçue: «L'auditoire Marguerite de Navarre était plein. Les médias se sont montrés intéressés.» Une petite révolution au pays des chapelles psychanalytiques.
A l'origine de cette démarche, la révolution déclenchée dans les années 1970 par la découverte de la plasticité neuronale. Le cerveau, qu'on croyait câblé une fois pour toutes à la fin du développement, se révélait en perpétuelle évolution, constamment en train de modifier le réseau des synapses, ces points de contact et de communication entre les neurones. Pierre Magistretti et François Ansermet montrent dans leur premier livre que ce phénomène de plasticité synaptique permet de voir le cerveau comme lentement façonné par l'expérience individuelle. Ce cerveau modelé par la vie, porteur des traces de l'expérience, correspond étrangement aux concepts empiriques de la psychanalyse.
Quoi de neuf depuis? «Nous écrivons un nouveau livre, dit Pierre Magistretti. Nous avions abordé dans le premier la façon dont les traces de l'expérience s'inscrivent dans le cerveau grâce à la plasticité synaptique. Dans le second, nous nous interrogeons sur les fonctions possibles de ces traces, au-delà de l'apprentissage et de l'adaptation.» Cette réflexion est nourrie par des travaux récents sur les modifications synaptiques induites chez le rongeur lors d'expériences d'apprentissage et de réexposition à des situations connues.
«La trace synaptique laissée par une expérience donnée est réactivée lorsque l'individu - ou l'animal - est placé dans un contexte comparable, explique Pierre Magistretti. Or cette réactivation ne conduit pas forcément au renforcement de la trace, comme on pouvait le supposer. Au contraire, celle-ci devient labile une fois réactivée. Elle peut perdre son lien avec l'expérience initiale, se réassocier à d'autres traces. Ce phénomène, appelé reconsolidation, joue un rôle très important dans le cerveau.»
Ces observations ont des conséquences fondamentales. «La réassociation continuelle des traces de l'expérience pourrait expliquer la constitution progressive d'une mémoire dissociée de ses circonstances d'apparition, devenue inaccessible, qui pourrait correspondre à l'inconscient de la psychanalyse, poursuit Pierre Magistretti. Il est frappant de constater que le contenu de l'inconscient, comme celui des rêves, se caractérise précisément par une absence d'inscription dans le temps ou dans l'espace de l'expérience.»
Reste à savoir quelle est la fonction de cette reconsolidation. Quel avantage peut bien procurer le mélange inextricable des traces de l'expérience? «Si la continuité entre l'expérience et ses traces était totalement linéaire, nous serions des êtres terriblement prévisibles, dit Pierre Magistretti. Or, la réassociation de traces vient bouleverser ce déterminisme. Elle crée une discontinuité entre l'expérience et ses traces synaptiques. Tout se passe comme si nous étions déterminés à ne pas être déterminés. A partir d'une expérience donnée, grâce à la réassociation des traces qui se produit durant la reconsolidation, nous construisons une identité singulière.»
Ce qui amène le scientifique à s'interroger sur notre vision du cerveau: «Les neurosciences cognitives ont beaucoup apporté à notre compréhension du fonctionnement cérébral. L'imagerie fonctionnelle permet d'identifier les zones du cerveau qui sont activées par des tâches cognitives ou des situations émotionnellement chargées. Le risque serait toutefois de glisser vers une vision mécaniste du cerveau. Or ce qui fait toute la richesse de l'humain, c'est probablement cette capacité à réassocier sans fin les traces de l'expérience, au point de constituer une réalité interne inconsciente - ou mieux, non connue, «unbewusst» comme la définissait Freud - qui nous affranchit du déterminisme et ouvre la possibilité de l'inattendu, de la créativité.»
*«A chacun son cerveau», Pierre Magistretti et François Ansermet, Ed. Odile Jacob (2004).
Hémisphère culturel Briser les chaînes de la causalité
Laurent Wolf
Le développement des sciences cognitives provoque aujourd'hui chez les artistes des interrogations analogues à celles que provoquaient, dans les années 1910-1920, les développements de la psychologie expérimentale et de la psychanalyse. La connaissance de plus en plus précise des processus matériels de la pensée et de la créativité finirait-elle par infirmer la croyance dans les possibilités de la création et de l'invention artistique? Depuis près d'un siècle, les artistes mettent en œuvre des dispositifs destinés à enrayer les déterminismes: assemblages d'objets et collages, utilisation du hasard, mise en condition physique ou psychique, etc.; comme, au début des années 1920, l'écriture automatique et les cadavres exquis des surréalistes.
L'écriture automatique, qui doit essentiellement à la lecture de Freud par André Breton, repose sur l'hypothèse qu'il est possible de faire apparaître un niveau de créativité subconscient ou inconscient par une discipline d'énonciation (écrite) qui fait perdre le contrôle au locuteur. Il s'agit de laisser filer la plume. Breton et Philippe Soupault le font pour la première fois dans Champs magnétiques (1920). L'écriture automatique, qui s'apparente à l'association libre et au rêve éveillé, est à la fois un médium poétique et un moyen de se connaître pour développer ensuite une création débarrassée du refoulement.
Les cadavres exquis, que les surréalistes pratiquaient à partir du milieu des années 1920, ont un but analogue. Ils utilisent la créativité collective. Les protagonistes du jeu (ou de l'expérience) composent des poèmes ou des dessins par fragments successifs, sans connaître ce qui précède. Des schémas et des modèles imprévus apparaissent, qui peuvent être ensuite repris au cours d'une création consciente, comme le fait Max Ernst dans ses collages (ci-dessus).
La petite histoire des matières premières (4/10)
Le Temps (Genève)
Nickel, le métal brillant venu du Grand Nord
NON FERREUX. Une ville de Russie arctique se consacre entièrement au «métal du diable»: Norilsk.
por Yves Genier
Largement utilisé dans la sidérurgie pour ses vertus inoxydantes, le nickel entre dans l'orbite humaine dans une ville qui lui est entièrement consacrée, Norilsk. Des environs arctiques de cette cité boréale, la deuxième en taille du Grand Nord russe avec plus de 200000 habitants, sortent plus de 120000 tonnes par année de ce métal aux reflets gris argent. Cela correspond à 41% de la production totale du premier producteur mondial avec 19% du marché mondial, le bien nommé groupe russe Norilsk Nickel.
Les aciéries, chantiers navals, fabricants de turbines et d'autres applications dévoreuses d'alliages inoxydables pour l'industrie lourde et la navigation commerciale sont-ils conscients du caractère dantesque du lieu de naissance du métal qu'elles emploie tant? Située à 69 degrés de latitude nord, là où la neige le dispute au gel l'essentiel de l'année, Norilsk est une cité de barres de béton et d'usines fumantes qui lui valent le triste rang de septième lieu le plus pollué de la planète. «La neige y est noire, l'air sent le souffre et l'espérance de vie des ouvriers des usines est de dix ans inférieure à la moyenne russe», écrit le Blacksmith Institute, une ONG britannique et américaine spécialisée dans les questions de pollution industrielle.
Une ville née du goulag
C'est la conséquence de l'une des pages les plus sombres de l'histoire industrielle du XXe siècle. Au milieu des années 1930, le gouvernement soviétique dirigé par Staline décide d'exploiter les gisements de cette région désolée. L'organisation du travail est dévolue au Guépéou, l'ancêtre du KGB. Norilsk naît ainsi en 1935 comme l'un des principaux camps de travail forcé du Goulag. Il faut quatre ans pour édifier la première fonderie. Elle participera activement à l'effort de guerre soviétique contre les nazis. Quelques décennies plus tard, toutes les mines et usines du Grand Nord russe produisant le trop bien nommé «métal du diable» sont rassemblées par une URSS agonisante dans un combinat qui sera vite privatisé, puis coté en bourse. Norilsk Nickel naît ainsi en novembre 1989 lorsque chute le mur de Berlin. Le groupe tombera en quelques années agitées entre les mains de Vladimir Potanine, l'un des principaux oligarques russes. Il faudra attendre les protestations internationales pour que ce dernier consente, pour des questions d'image, à moderniser l'outil de production et tenter d'en réduire les émissions polluantes.
Les conditions de vie extrêmes n'ont pas empêché la population de la ville de bondir ces dernières années après un fort tassement démographique pendant les années 1990. Quant au cours du nickel, il a suivi la tendance inverse. Après avoir flambé à plus de 51000 dollars la tonne en mai 2007, il a replongé aux alentours de 20400 dollars pour cause de stocks trop élevés et de crainte d'un ralentissement industriel.
Fiche signalétique: le nickel
Yves Genier
D'un blanc argenté avec des reflets gris, le nickel se confond parfois avec l'argent. Du reste, il a longtemps été employé pour la fabrication des pièces de monnaie. Une expression américaine rappelle encore le souvenir de cette époque: le nickel est une pièce de cinq cents. La pratique a cependant été largement abandonnée, le métal étant plus utile dans des applications industrielles comme les alliages inoxydables ou montrant une grande stabilité face à des chaleurs jusqu'à 200 degrés lorsqu'il est allié au fer.
Identifié par le symbole Ni, le métal dit «du diable» se trouve concentré en deux endroits du globe que tout oppose: la péninsule boréale russe de Taïmyr en recèle environ un tiers, un autre tiers se nichant dans le sous-sol de la Nouvelle-Calédonie, île française du Pacifique Sud.
Producteur de 19% du total mondial, Norilsk Nickel devrait se faire détrôner prochainement par l'actuel numéro deux, le brésilien CVRD. Le premier vend annuellement quelque 290000 tonnes, tandis que le second en extrait déjà 285000 tonnes.
Nickel, le métal brillant venu du Grand Nord
NON FERREUX. Une ville de Russie arctique se consacre entièrement au «métal du diable»: Norilsk.
por Yves Genier
Largement utilisé dans la sidérurgie pour ses vertus inoxydantes, le nickel entre dans l'orbite humaine dans une ville qui lui est entièrement consacrée, Norilsk. Des environs arctiques de cette cité boréale, la deuxième en taille du Grand Nord russe avec plus de 200000 habitants, sortent plus de 120000 tonnes par année de ce métal aux reflets gris argent. Cela correspond à 41% de la production totale du premier producteur mondial avec 19% du marché mondial, le bien nommé groupe russe Norilsk Nickel.
Les aciéries, chantiers navals, fabricants de turbines et d'autres applications dévoreuses d'alliages inoxydables pour l'industrie lourde et la navigation commerciale sont-ils conscients du caractère dantesque du lieu de naissance du métal qu'elles emploie tant? Située à 69 degrés de latitude nord, là où la neige le dispute au gel l'essentiel de l'année, Norilsk est une cité de barres de béton et d'usines fumantes qui lui valent le triste rang de septième lieu le plus pollué de la planète. «La neige y est noire, l'air sent le souffre et l'espérance de vie des ouvriers des usines est de dix ans inférieure à la moyenne russe», écrit le Blacksmith Institute, une ONG britannique et américaine spécialisée dans les questions de pollution industrielle.
Une ville née du goulag
C'est la conséquence de l'une des pages les plus sombres de l'histoire industrielle du XXe siècle. Au milieu des années 1930, le gouvernement soviétique dirigé par Staline décide d'exploiter les gisements de cette région désolée. L'organisation du travail est dévolue au Guépéou, l'ancêtre du KGB. Norilsk naît ainsi en 1935 comme l'un des principaux camps de travail forcé du Goulag. Il faut quatre ans pour édifier la première fonderie. Elle participera activement à l'effort de guerre soviétique contre les nazis. Quelques décennies plus tard, toutes les mines et usines du Grand Nord russe produisant le trop bien nommé «métal du diable» sont rassemblées par une URSS agonisante dans un combinat qui sera vite privatisé, puis coté en bourse. Norilsk Nickel naît ainsi en novembre 1989 lorsque chute le mur de Berlin. Le groupe tombera en quelques années agitées entre les mains de Vladimir Potanine, l'un des principaux oligarques russes. Il faudra attendre les protestations internationales pour que ce dernier consente, pour des questions d'image, à moderniser l'outil de production et tenter d'en réduire les émissions polluantes.
Les conditions de vie extrêmes n'ont pas empêché la population de la ville de bondir ces dernières années après un fort tassement démographique pendant les années 1990. Quant au cours du nickel, il a suivi la tendance inverse. Après avoir flambé à plus de 51000 dollars la tonne en mai 2007, il a replongé aux alentours de 20400 dollars pour cause de stocks trop élevés et de crainte d'un ralentissement industriel.
Fiche signalétique: le nickel
Yves Genier
D'un blanc argenté avec des reflets gris, le nickel se confond parfois avec l'argent. Du reste, il a longtemps été employé pour la fabrication des pièces de monnaie. Une expression américaine rappelle encore le souvenir de cette époque: le nickel est une pièce de cinq cents. La pratique a cependant été largement abandonnée, le métal étant plus utile dans des applications industrielles comme les alliages inoxydables ou montrant une grande stabilité face à des chaleurs jusqu'à 200 degrés lorsqu'il est allié au fer.
Identifié par le symbole Ni, le métal dit «du diable» se trouve concentré en deux endroits du globe que tout oppose: la péninsule boréale russe de Taïmyr en recèle environ un tiers, un autre tiers se nichant dans le sous-sol de la Nouvelle-Calédonie, île française du Pacifique Sud.
Producteur de 19% du total mondial, Norilsk Nickel devrait se faire détrôner prochainement par l'actuel numéro deux, le brésilien CVRD. Le premier vend annuellement quelque 290000 tonnes, tandis que le second en extrait déjà 285000 tonnes.
quinta-feira, julho 17, 2008
Indice de hoje
- Le cerveau dans tous ses états (4/5) - Mémoire, tous tes souvenirs sont faux! (Le Temps, Genève)
- La petite histoire des matières premières (3/10) (Le Temps, Genève)
- La petite histoire des matières premières (3/10) (Le Temps, Genève)
Le cerveau dans tous ses états (4/5) - Mémoire, tous tes souvenirs sont faux!
Le Temps (Genève)
por Hervé Morin
De son effrayant voyage mental dans des contrées inexplorées de la mémoire, Beth Rutherford tire cette leçon: «Le pouvoir de suggestion est sous-estimé.» A l'âge de 19 ans, cette Américaine, stressée par son travail d'infirmière, décide de consulter une psychothérapeute. Elle ne se doute pas alors qu'un passé enfoui va surgir et transformer sa vie. Au fil des séances de thérapie de «mémoire retrouvée», elle découvre qu'elle a été violée moult fois par son père entre 7 et 14 ans. Qu'il lui a fait subir un avortement. Accusé par sa fille, celui-ci perd son emploi et risque la prison.
«Je me souvenais qu'il avait introduit en moi des ciseaux et une fourchette, et d'autres horreurs», dit-elle dans un témoignage publié par la Fondation sur le syndrome des faux souvenirs. Car c'est bien de cela qu'il s'agit: rien de ce qu'elle croyait avoir enduré n'était arrivé. Comme devaient le montrer des examens médicaux, Beth était encore vierge, et son père avait subi une vasectomie bien avant les événements incriminés.
Aux Etats-Unis, Beth est devenue un emblème du syndrome du faux souvenir. Depuis les années 1980, on compte des centaines de procès mettant aux prises des adultes accusant leurs parents d'abus sexuel ou de pratiques sataniques, puis se retournant contre le psychothérapeute ayant introduit ces «souvenirs» dans leur mémoire. En Europe, ces cas sont moins fréquents. La théorie psychanalytique y a-t-elle été mieux digérée? Freud a vite réalisé que les trop nombreux témoignages d'abus sexuels que faisait naître sa cure étaient le fruit de celle-ci. Ce qui l'a conduit à les ranger dans la catégorie des fantasmes.
Paul Bensussan, psychiatre et expert auprès des tribunaux, a cependant eu l'occasion de poser à maintes reprises un diagnostic de «souvenir retrouvé» erroné. Selon lui, le monde judiciaire ne semble pas conscient de cette problématique: «En qualifiant d'emblée le ou la plaignant(e) de «victime» on a tendance à confondre crédibilité, sincérité et véracité. On est alors très loin de se demander s'il y a eu induction par un thérapeute et de s'interroger sur le rôle de celui-ci dans le dévoilement.»
La question demeure: comment la mémoire humaine peut-elle à ce point être remodelée? La réponse est peut-être que, par essence, tous nos souvenirs sont faux ou, du moins, falsifiables.
La psychologue américaine Elizabeth Loftus est une pionnière du sujet. Elle a d'abord pris conscience de la malléabilité des témoignages à travers des expériences sur le langage. L'une d'elles consistait à présenter un film montrant un accident de voiture et à demander à des sujets d'évaluer la vitesse des véhicules quand ils «s'écrasaient l'un contre l'autre». Elle a constaté que les estimations étaient moins élevées lorsqu'elle employait le verbe «percuter», plus neutre. Mais le plus surprenant, c'est qu'avec la première formulation, les «témoins» disaient avoir vu du verre brisé sur la chaussée alors que ce n'était pas le cas.
Ces observations ont conduit Elizabeth Loftus à imaginer des stratagèmes pour induire des faux souvenirs. Certains sont plus réceptifs à ces remodelages de la mémoire - notamment ceux qui croient avoir vécu des expériences de vies antérieures. Les techniques de transformation des souvenirs sont innombrables: insérer des personnages dans un album photo, introduire une histoire familiale fictive au milieu de témoignages véridiques...
Un quart des participants à ce type d'expérience ont été persuadés qu'enfants, ils s'étaient perdus dans un centre commercial. Nombre ont assuré avoir vu à Disneyland Bugs Bunny, le lapin de dessins animés appartenant à la société concurrente, Warner Bros. D'autres ont cru avoir été intoxiqués par des aliments, refusant de les inclure dans un menu fictif.
«Quand vous changez un souvenir, cela vous change», dit Elizabeth Loftus. Trente-cinq ans de recherches sur les distorsions de la mémoire l'ont convaincue que «les souvenirs ne sont pas la somme de ce qu'une personne a fait, mais bien plus la somme de ce qu'elle a pensé, de ce qu'on lui a dit, et de ce qu'elle croit». Cette conviction a conduit, dès 1997, le Royal College of Psychiatry britannique à enjoindre aux psychiatres anglais d'«éviter de recourir à toute technique de réactivation des souvenirs basée sur l'hypothèse de violences sexuelles anciennes dont le patient a perdu le souvenir».
D'autres chercheurs tentent d'améliorer le système judiciaire en proposant des procédures d'interrogatoire le plus neutres possibles. Pour «figer» les détails d'une scène criminelle dans la mémoire des témoins, Lorraine Hope, de l'Université de Portsmouth, a mis au point avec la police un questionnaire «autoadministré», afin d'éviter les biais de suggestion. Ceux qui le remplissent donnent des indications bien plus précises que ceux à qui on demande simplement de se souvenir «du maximum de détails».
Les psychologues ne sont pas les seuls à se passionner pour les faux souvenirs. Depuis une dizaine d'années, les processus cérébraux soupçonnés de faciliter leur formation sont au cœur d'une petite révolution en neurobiologie. «Nous cherchions tout autre chose», se souvient Susan Sara (Collège de France). En 1997, elle testait des molécules pour mesurer leur impact sur les performances d'orientation de rats placés dans un labyrinthe. «Le lendemain des injections, ils se comportaient comme s'ils étaient amnésiques, vis-à-vis d'un parcours qu'ils connaissaient par cœur.»
Cette observation l'a conduite à proposer un nouvel étage dans les processus de mémorisation, la reconsolidation. Nombre d'expériences avaient déjà montré que les apprentissages deviennent plus robustes avec le temps, à mesure que les réseaux neuronaux qui en portent la trace se renforcent. C'est la consolidation - dans laquelle le sommeil joue un rôle fondamental.
Par la suite, lorsqu'un indice réveille un souvenir (pour le rat, une lumière associée à un apprentissage), le réseau neuronal correspondant redevient labile, malléable, en général pour être renforcé. Mais ce mécanisme dynamique ouvre la voie à des transformations plus radicales, notamment si on fait intervenir artificiellement des molécules impliquées dans la cascade de réactions physico-chimiques qui commandent la vie des neurones et de leurs contacts synaptiques. C'est ce qui a entraîné l'amnésie des rats de Susan Sara.
Ce phénomène de réactivation ouvre, selon la neurobiologiste Pascale Gisquet (Université Paris Sud), des perspectives thérapeutiques. Notamment vis-à-vis de pathologies psychiatriques «qui pourraient en fait résulter d'un hyperfonctionnement des processus de la mémoire». Elle évoque ainsi l'exemple de l'état de stress post-traumatique (ESPT), qui amène 17% des personnes soumises à des événements dramatiques à les revivre en boucle...
Des premiers résultats encourageants montrent qu'une molécule, le propanolol, administrée à des personnes souffrant d'ESPT au moment où on leur demande de raconter l'événement traumatisant, conduit à une réduction significative de ces réponses physiologiques. «C'est la première fois que l'on cible la mémoire sur le mode thérapeutique», se félicite Karim Nader (Université McGill, Montréal), l'un des auteurs de cette étude.
«Chez les drogués, ajoute Pascale Gisquet, la rechute est souvent provoquée par des souvenirs de prise de drogues provoqués par des indices qu'ils rencontrent dans leur environnement» - la vue d'une petite cuillère ou d'une cage d'escalier sombre peut ainsi faire renaître un besoin incoercible de drogue. Serait-il possible d'affaiblir ce circuit fatal en jouant sur la réactivation induite par de tels indices?
A nouveau, le propanolol a été mis à contribution, sur des rats qui avaient été conditionnés à s'autoadministrer de la cocaïne ou du sucre en présence de certains stimuli. L'injection de propanolol a permis de dégrader ce conditionnement, comme si les rats avaient oublié que ces stimuli étaient le signal qu'ils allaient pouvoir (devoir?) assouvir leur addiction. «Chez l'homme, pour cibler et affaiblir les indices pertinents susceptibles d'induire une rechute, il faudrait probablement passer par des questionnaires, estime Jonathon Lee (Université de Cambridge), coauteur de l'étude. Et s'assurer que l'injection n'entraîne pas de pertes de mémoire étendues.»
«La reconsolidation est un phénomène très intéressant. Mais il est encore trop tôt pour savoir ce qui en sortira», tempère le Nobel de médecine Erik Kandel. Lui aussi a acquis la conviction que la mémoire est en quelque sorte une œuvre de fiction: «Quand je vous regarde, mon cerveau ne vous photographie pas, mais construit à partir des contours de votre visage une image de vous, qui sera différente de celle construite par une autre personne.» Quand il se souviendra de cette discussion, assure-t-il, ce processus mental se répétera. «La mémoire est une reconstruction d'une reconstruction, qui change en permanence. Pour chaque souvenir, il y a une chance de distorsion», dit Erik Kandel. Auteur d'une passionnante autobiographie*, il avoue s'être posé la question de la véracité de certains détails qu'il y relate... «Le souvenir est création», résume le neuropsychologue Francis Eustache, que la relativité de la mémoire rend philosophe: «Lisez Bergson, dans Matière et mémoire: pour évoquer le passé [...], il faut savoir rêver.» Le Monde
* «A la recherche de la mémoire», Eric Kandel, Odile Jacob, 512 p.
Hémisphère culturel «Total Recall», une vie recréée de toutes pièces
Elsa Duperray
Un implant. Rien de tel qu'un implant dans le cerveau pour induire de faux souvenirs. Voici un stratagème que n'aurait jamais pu imaginer Elizabeth Loftus, la psychologue citée ci-dessus. Sauf si elle a un jour regardé Total Recall. En français: se souvenir de tout. Se souvenir surtout de qui on est. Telle est l'irrépressible quête identitaire que mène Douglas Quaid, sous les traits d'Arnold Schwarzenegger, dans le film de Paul Verhoeven, tourné en 1990. Toutes les nuits, Douglas fait le même rêve à propos de Mars. Tout est si net qu'il pense y être déjà allé et souhaite y retourner, ce dont l'en dissuade Lori (Sharon Stone), sa femme. Un «voyage» virtuel et mental sur Mars va alors réveiller certains souvenirs et lui révéler que toute sa vie - celle qu'il croit être la sienne- n'est que pure invention. Douglas a en réalité été reconditionné mentalement: un implant, placé dans son cerveau à son insu, a effacé sa mémoire et lui suggère à la place de nouveaux (faux) souvenirs, créés de toutes pièces. Inventés, ses huit années de mariage avec Lori (qu'il ne connaît en fait que depuis six semaines) ses collègues, son travail, ses amis. Tout est irréel.
Perdu entre illusion et vérité, Schwarzenegger tente de se reconstruire en retrouvant ses propres souvenirs. Pour lui, la mémoire définit l'individu. Erreur, nous explique Verhoeven. «Pourquoi veux-tu retrouver ta mémoire?» fait-il dire à l'un de ses protagonistes. «Pour être moi-même», répond Schwarzy. «Tu es ce que tu fais, reprend le premier. Un homme se définit par ses actes et non par sa mémoire.» Pour preuve: quand Douglas retrouve enfin la mémoire, il apprend qu'il faisait partie des «méchants»... Une terrible vérité oubliée au profit d'une nouvelle identité.
por Hervé Morin
De son effrayant voyage mental dans des contrées inexplorées de la mémoire, Beth Rutherford tire cette leçon: «Le pouvoir de suggestion est sous-estimé.» A l'âge de 19 ans, cette Américaine, stressée par son travail d'infirmière, décide de consulter une psychothérapeute. Elle ne se doute pas alors qu'un passé enfoui va surgir et transformer sa vie. Au fil des séances de thérapie de «mémoire retrouvée», elle découvre qu'elle a été violée moult fois par son père entre 7 et 14 ans. Qu'il lui a fait subir un avortement. Accusé par sa fille, celui-ci perd son emploi et risque la prison.
«Je me souvenais qu'il avait introduit en moi des ciseaux et une fourchette, et d'autres horreurs», dit-elle dans un témoignage publié par la Fondation sur le syndrome des faux souvenirs. Car c'est bien de cela qu'il s'agit: rien de ce qu'elle croyait avoir enduré n'était arrivé. Comme devaient le montrer des examens médicaux, Beth était encore vierge, et son père avait subi une vasectomie bien avant les événements incriminés.
Aux Etats-Unis, Beth est devenue un emblème du syndrome du faux souvenir. Depuis les années 1980, on compte des centaines de procès mettant aux prises des adultes accusant leurs parents d'abus sexuel ou de pratiques sataniques, puis se retournant contre le psychothérapeute ayant introduit ces «souvenirs» dans leur mémoire. En Europe, ces cas sont moins fréquents. La théorie psychanalytique y a-t-elle été mieux digérée? Freud a vite réalisé que les trop nombreux témoignages d'abus sexuels que faisait naître sa cure étaient le fruit de celle-ci. Ce qui l'a conduit à les ranger dans la catégorie des fantasmes.
Paul Bensussan, psychiatre et expert auprès des tribunaux, a cependant eu l'occasion de poser à maintes reprises un diagnostic de «souvenir retrouvé» erroné. Selon lui, le monde judiciaire ne semble pas conscient de cette problématique: «En qualifiant d'emblée le ou la plaignant(e) de «victime» on a tendance à confondre crédibilité, sincérité et véracité. On est alors très loin de se demander s'il y a eu induction par un thérapeute et de s'interroger sur le rôle de celui-ci dans le dévoilement.»
La question demeure: comment la mémoire humaine peut-elle à ce point être remodelée? La réponse est peut-être que, par essence, tous nos souvenirs sont faux ou, du moins, falsifiables.
La psychologue américaine Elizabeth Loftus est une pionnière du sujet. Elle a d'abord pris conscience de la malléabilité des témoignages à travers des expériences sur le langage. L'une d'elles consistait à présenter un film montrant un accident de voiture et à demander à des sujets d'évaluer la vitesse des véhicules quand ils «s'écrasaient l'un contre l'autre». Elle a constaté que les estimations étaient moins élevées lorsqu'elle employait le verbe «percuter», plus neutre. Mais le plus surprenant, c'est qu'avec la première formulation, les «témoins» disaient avoir vu du verre brisé sur la chaussée alors que ce n'était pas le cas.
Ces observations ont conduit Elizabeth Loftus à imaginer des stratagèmes pour induire des faux souvenirs. Certains sont plus réceptifs à ces remodelages de la mémoire - notamment ceux qui croient avoir vécu des expériences de vies antérieures. Les techniques de transformation des souvenirs sont innombrables: insérer des personnages dans un album photo, introduire une histoire familiale fictive au milieu de témoignages véridiques...
Un quart des participants à ce type d'expérience ont été persuadés qu'enfants, ils s'étaient perdus dans un centre commercial. Nombre ont assuré avoir vu à Disneyland Bugs Bunny, le lapin de dessins animés appartenant à la société concurrente, Warner Bros. D'autres ont cru avoir été intoxiqués par des aliments, refusant de les inclure dans un menu fictif.
«Quand vous changez un souvenir, cela vous change», dit Elizabeth Loftus. Trente-cinq ans de recherches sur les distorsions de la mémoire l'ont convaincue que «les souvenirs ne sont pas la somme de ce qu'une personne a fait, mais bien plus la somme de ce qu'elle a pensé, de ce qu'on lui a dit, et de ce qu'elle croit». Cette conviction a conduit, dès 1997, le Royal College of Psychiatry britannique à enjoindre aux psychiatres anglais d'«éviter de recourir à toute technique de réactivation des souvenirs basée sur l'hypothèse de violences sexuelles anciennes dont le patient a perdu le souvenir».
D'autres chercheurs tentent d'améliorer le système judiciaire en proposant des procédures d'interrogatoire le plus neutres possibles. Pour «figer» les détails d'une scène criminelle dans la mémoire des témoins, Lorraine Hope, de l'Université de Portsmouth, a mis au point avec la police un questionnaire «autoadministré», afin d'éviter les biais de suggestion. Ceux qui le remplissent donnent des indications bien plus précises que ceux à qui on demande simplement de se souvenir «du maximum de détails».
Les psychologues ne sont pas les seuls à se passionner pour les faux souvenirs. Depuis une dizaine d'années, les processus cérébraux soupçonnés de faciliter leur formation sont au cœur d'une petite révolution en neurobiologie. «Nous cherchions tout autre chose», se souvient Susan Sara (Collège de France). En 1997, elle testait des molécules pour mesurer leur impact sur les performances d'orientation de rats placés dans un labyrinthe. «Le lendemain des injections, ils se comportaient comme s'ils étaient amnésiques, vis-à-vis d'un parcours qu'ils connaissaient par cœur.»
Cette observation l'a conduite à proposer un nouvel étage dans les processus de mémorisation, la reconsolidation. Nombre d'expériences avaient déjà montré que les apprentissages deviennent plus robustes avec le temps, à mesure que les réseaux neuronaux qui en portent la trace se renforcent. C'est la consolidation - dans laquelle le sommeil joue un rôle fondamental.
Par la suite, lorsqu'un indice réveille un souvenir (pour le rat, une lumière associée à un apprentissage), le réseau neuronal correspondant redevient labile, malléable, en général pour être renforcé. Mais ce mécanisme dynamique ouvre la voie à des transformations plus radicales, notamment si on fait intervenir artificiellement des molécules impliquées dans la cascade de réactions physico-chimiques qui commandent la vie des neurones et de leurs contacts synaptiques. C'est ce qui a entraîné l'amnésie des rats de Susan Sara.
Ce phénomène de réactivation ouvre, selon la neurobiologiste Pascale Gisquet (Université Paris Sud), des perspectives thérapeutiques. Notamment vis-à-vis de pathologies psychiatriques «qui pourraient en fait résulter d'un hyperfonctionnement des processus de la mémoire». Elle évoque ainsi l'exemple de l'état de stress post-traumatique (ESPT), qui amène 17% des personnes soumises à des événements dramatiques à les revivre en boucle...
Des premiers résultats encourageants montrent qu'une molécule, le propanolol, administrée à des personnes souffrant d'ESPT au moment où on leur demande de raconter l'événement traumatisant, conduit à une réduction significative de ces réponses physiologiques. «C'est la première fois que l'on cible la mémoire sur le mode thérapeutique», se félicite Karim Nader (Université McGill, Montréal), l'un des auteurs de cette étude.
«Chez les drogués, ajoute Pascale Gisquet, la rechute est souvent provoquée par des souvenirs de prise de drogues provoqués par des indices qu'ils rencontrent dans leur environnement» - la vue d'une petite cuillère ou d'une cage d'escalier sombre peut ainsi faire renaître un besoin incoercible de drogue. Serait-il possible d'affaiblir ce circuit fatal en jouant sur la réactivation induite par de tels indices?
A nouveau, le propanolol a été mis à contribution, sur des rats qui avaient été conditionnés à s'autoadministrer de la cocaïne ou du sucre en présence de certains stimuli. L'injection de propanolol a permis de dégrader ce conditionnement, comme si les rats avaient oublié que ces stimuli étaient le signal qu'ils allaient pouvoir (devoir?) assouvir leur addiction. «Chez l'homme, pour cibler et affaiblir les indices pertinents susceptibles d'induire une rechute, il faudrait probablement passer par des questionnaires, estime Jonathon Lee (Université de Cambridge), coauteur de l'étude. Et s'assurer que l'injection n'entraîne pas de pertes de mémoire étendues.»
«La reconsolidation est un phénomène très intéressant. Mais il est encore trop tôt pour savoir ce qui en sortira», tempère le Nobel de médecine Erik Kandel. Lui aussi a acquis la conviction que la mémoire est en quelque sorte une œuvre de fiction: «Quand je vous regarde, mon cerveau ne vous photographie pas, mais construit à partir des contours de votre visage une image de vous, qui sera différente de celle construite par une autre personne.» Quand il se souviendra de cette discussion, assure-t-il, ce processus mental se répétera. «La mémoire est une reconstruction d'une reconstruction, qui change en permanence. Pour chaque souvenir, il y a une chance de distorsion», dit Erik Kandel. Auteur d'une passionnante autobiographie*, il avoue s'être posé la question de la véracité de certains détails qu'il y relate... «Le souvenir est création», résume le neuropsychologue Francis Eustache, que la relativité de la mémoire rend philosophe: «Lisez Bergson, dans Matière et mémoire: pour évoquer le passé [...], il faut savoir rêver.» Le Monde
* «A la recherche de la mémoire», Eric Kandel, Odile Jacob, 512 p.
Hémisphère culturel «Total Recall», une vie recréée de toutes pièces
Elsa Duperray
Un implant. Rien de tel qu'un implant dans le cerveau pour induire de faux souvenirs. Voici un stratagème que n'aurait jamais pu imaginer Elizabeth Loftus, la psychologue citée ci-dessus. Sauf si elle a un jour regardé Total Recall. En français: se souvenir de tout. Se souvenir surtout de qui on est. Telle est l'irrépressible quête identitaire que mène Douglas Quaid, sous les traits d'Arnold Schwarzenegger, dans le film de Paul Verhoeven, tourné en 1990. Toutes les nuits, Douglas fait le même rêve à propos de Mars. Tout est si net qu'il pense y être déjà allé et souhaite y retourner, ce dont l'en dissuade Lori (Sharon Stone), sa femme. Un «voyage» virtuel et mental sur Mars va alors réveiller certains souvenirs et lui révéler que toute sa vie - celle qu'il croit être la sienne- n'est que pure invention. Douglas a en réalité été reconditionné mentalement: un implant, placé dans son cerveau à son insu, a effacé sa mémoire et lui suggère à la place de nouveaux (faux) souvenirs, créés de toutes pièces. Inventés, ses huit années de mariage avec Lori (qu'il ne connaît en fait que depuis six semaines) ses collègues, son travail, ses amis. Tout est irréel.
Perdu entre illusion et vérité, Schwarzenegger tente de se reconstruire en retrouvant ses propres souvenirs. Pour lui, la mémoire définit l'individu. Erreur, nous explique Verhoeven. «Pourquoi veux-tu retrouver ta mémoire?» fait-il dire à l'un de ses protagonistes. «Pour être moi-même», répond Schwarzy. «Tu es ce que tu fais, reprend le premier. Un homme se définit par ses actes et non par sa mémoire.» Pour preuve: quand Douglas retrouve enfin la mémoire, il apprend qu'il faisait partie des «méchants»... Une terrible vérité oubliée au profit d'une nouvelle identité.
La petite histoire des matières premières (3/10)
Le Temps (Genève)
Le prix des grains monte au nez des moutardiers
OLEAGINEUX. En un an, les producteurs de condiments ont encaissé une envolée de 150% de la graine de moutarde.
por Pierre-Alexandre Sallier
L'envolée des prix agricoles vient, par effet domino, perturber le commerce de céréales oubliées. Comme celui de la graine de moutarde. Celle-ci s'est appréciée de 150% sur un an. Après avoir déjà connu une inflation de 50% au cours des trois années précédentes. En France, les moutardiers, qui produisent 90000 tonnes de condiments par an, font la grimace.
Les Chinois se seraient-ils soudain mis à assortir chacun de leurs plats de moutarde de Dijon, au point de faire exploser la demande de graines de brassica juncea? Le phénomène est plus indirect. Le gros des récoltes des plaines canadiennes du Saskatchewan ou du Manitoba fournit en effet également une huile de cuisson épicée, prisée en Inde ou en Afrique. Or l'envolée des prix de tous les oléagineux a fait tache d'huile sur celui de la moutarde. Sans compter que les agriculteurs canadiens sont tentés de cultiver des espèces plus rémunératrices - destinées, par exemple, aux biocarburants. A moins que leurs clients bourguignons ne les convainquent du contraire. Au prix fort.
Coup dur pour les fabricants
«Lors de la négociation de nos approvisionnements, au printemps, nous nous sommes vu demander 1200 euros la tonne pour les graines livrées en fin d'année, contre 500 euros l'an dernier», témoigne Marc Désarménien, patron des Etablissements Fallot, un fabricant traditionnel de Beaune préparant 2000 tonnes par an de pâte de moutarde. Dans l'Hexagone, les trois premiers transformateurs sont le néerlandais Unilever (marques Amora-Maille) et les Allemands Kuhne (Bornier) et Develey (Reine de Dijon).
Pénurie en vue?
Cet accroissement du coût de la graine - qui représente le tiers du poids du condiment - devrait provoquer une augmentation de 0,40euro par kilo. Pas négligeable, quand les tarifs au détail oscillent entre 2 euros pour les produits «premier prix», à 12 euros pour le haut de gamme. «C'est un coup dur», s'exclame le patron de cette PME employant 20 personnes et réalisant 4,8 millions d'euros de chiffre d'affaires, dont la moitié à l'export. En effet si ses clients français auront peut-être du mal à se passer de moutarde pour préparer la vinaigrette, les Américains eux y réfléchiront à deux fois, les taxes d'importations aux Etats-Unis faisant doubler le prix du produit!
Les stocks hérités des précédentes campagnes sont si faibles que «si la récolte de cette année n'est pas au rendez-vous, ce sera la catastrophe et l'on pourrait faire face à des ruptures d'approvisionnements», prévient le responsable de cette entreprise familiale créée en 1840. En dépit de la relance de la culture locale, les agriculteurs bourguignons ne sont guère à même de venir à la rescousse. Ceux-ci ne cultivent que 1600 hectares de la graine brune, le centième des surfaces canadiennes. Pas de quoi assurer plus de quelques pour-cent des besoins des moutardiers de la région de Dijon.
Le prix des grains monte au nez des moutardiers
OLEAGINEUX. En un an, les producteurs de condiments ont encaissé une envolée de 150% de la graine de moutarde.
por Pierre-Alexandre Sallier
L'envolée des prix agricoles vient, par effet domino, perturber le commerce de céréales oubliées. Comme celui de la graine de moutarde. Celle-ci s'est appréciée de 150% sur un an. Après avoir déjà connu une inflation de 50% au cours des trois années précédentes. En France, les moutardiers, qui produisent 90000 tonnes de condiments par an, font la grimace.
Les Chinois se seraient-ils soudain mis à assortir chacun de leurs plats de moutarde de Dijon, au point de faire exploser la demande de graines de brassica juncea? Le phénomène est plus indirect. Le gros des récoltes des plaines canadiennes du Saskatchewan ou du Manitoba fournit en effet également une huile de cuisson épicée, prisée en Inde ou en Afrique. Or l'envolée des prix de tous les oléagineux a fait tache d'huile sur celui de la moutarde. Sans compter que les agriculteurs canadiens sont tentés de cultiver des espèces plus rémunératrices - destinées, par exemple, aux biocarburants. A moins que leurs clients bourguignons ne les convainquent du contraire. Au prix fort.
Coup dur pour les fabricants
«Lors de la négociation de nos approvisionnements, au printemps, nous nous sommes vu demander 1200 euros la tonne pour les graines livrées en fin d'année, contre 500 euros l'an dernier», témoigne Marc Désarménien, patron des Etablissements Fallot, un fabricant traditionnel de Beaune préparant 2000 tonnes par an de pâte de moutarde. Dans l'Hexagone, les trois premiers transformateurs sont le néerlandais Unilever (marques Amora-Maille) et les Allemands Kuhne (Bornier) et Develey (Reine de Dijon).
Pénurie en vue?
Cet accroissement du coût de la graine - qui représente le tiers du poids du condiment - devrait provoquer une augmentation de 0,40euro par kilo. Pas négligeable, quand les tarifs au détail oscillent entre 2 euros pour les produits «premier prix», à 12 euros pour le haut de gamme. «C'est un coup dur», s'exclame le patron de cette PME employant 20 personnes et réalisant 4,8 millions d'euros de chiffre d'affaires, dont la moitié à l'export. En effet si ses clients français auront peut-être du mal à se passer de moutarde pour préparer la vinaigrette, les Américains eux y réfléchiront à deux fois, les taxes d'importations aux Etats-Unis faisant doubler le prix du produit!
Les stocks hérités des précédentes campagnes sont si faibles que «si la récolte de cette année n'est pas au rendez-vous, ce sera la catastrophe et l'on pourrait faire face à des ruptures d'approvisionnements», prévient le responsable de cette entreprise familiale créée en 1840. En dépit de la relance de la culture locale, les agriculteurs bourguignons ne sont guère à même de venir à la rescousse. Ceux-ci ne cultivent que 1600 hectares de la graine brune, le centième des surfaces canadiennes. Pas de quoi assurer plus de quelques pour-cent des besoins des moutardiers de la région de Dijon.
quarta-feira, julho 16, 2008
Indice de hoje
- Astrônomos descobrem segunda estrela mais brilhante da Via Láctea (Folha de S. Paulo, Brasil)
- Marte: agua en casi todas partes (El Mundo, Madrid)
- Le cerveau dans tous ses états (3/5) - L'addiction, du sable dans les rouages neuronaux (Le Temps, Genève)
- La petite histoire des matières premières (2/10) (Le Temps, Genève)
- Marte: agua en casi todas partes (El Mundo, Madrid)
- Le cerveau dans tous ses états (3/5) - L'addiction, du sable dans les rouages neuronaux (Le Temps, Genève)
- La petite histoire des matières premières (2/10) (Le Temps, Genève)
Astrônomos descobrem segunda estrela mais brilhante da Via Láctea
Folha de S. Paulo (Brasil)
Imagem do telescópio Spitzer mostra a estrela Peony, na região central da Via Láctea
Pesquisadores detectaram o que julgam ser a segunda estrela mais brilhante da Via Láctea. Com o uso do telescópio Spitzer, da Nasa (agência espacial norte-americana), eles notaram a existência da estrela Peony, com um brilho estimado de 3,2 milhões de sóis.
A atual "campeã" no quesito é a Eta Carina, com uma luminosidade de 4,7 milhões de sóis. Entretanto, segundo astrônomos, é difícil estimar o nível exato de brilho das estrelas, então ambas podem ter índices similares.
Além da estrela em si, os astrônomos notaram uma nuvem de poeira e gás, chamado nebulosa, cercando o astro. O objeto espacial levou o nome de Peony em razão de lembrar a flor peônia.
"A nebulosa da estrela Peony é uma criatura fascinante. Parece ser a segunda estrela mais brilhante que nós conhecemos na galáxia, e está localizada no centro da galáxia", afirmou, em nota, Lidia Oskinova, da Universidade de Potsdam, na Alemanha. "Há provavelmente outras estrelas tão brilhantes, se não mais brilhantes, que permanecem escondidas de nossa visão".
Segundo os pesquisadores, Peony está madura o suficiente para explodir em breve, em um processo chamado supernova --"breve", em astronomia pode ser qualquer período entre agora e milhões de anos, ressalvam os pesquisadores.
"Quando essa estrela explodir, vai evaporar qualquer planeta orbitando nas adjacências", afirma Oskinova.
Imagem do telescópio Spitzer mostra a estrela Peony, na região central da Via Láctea
Pesquisadores detectaram o que julgam ser a segunda estrela mais brilhante da Via Láctea. Com o uso do telescópio Spitzer, da Nasa (agência espacial norte-americana), eles notaram a existência da estrela Peony, com um brilho estimado de 3,2 milhões de sóis.
A atual "campeã" no quesito é a Eta Carina, com uma luminosidade de 4,7 milhões de sóis. Entretanto, segundo astrônomos, é difícil estimar o nível exato de brilho das estrelas, então ambas podem ter índices similares.
Além da estrela em si, os astrônomos notaram uma nuvem de poeira e gás, chamado nebulosa, cercando o astro. O objeto espacial levou o nome de Peony em razão de lembrar a flor peônia.
"A nebulosa da estrela Peony é uma criatura fascinante. Parece ser a segunda estrela mais brilhante que nós conhecemos na galáxia, e está localizada no centro da galáxia", afirmou, em nota, Lidia Oskinova, da Universidade de Potsdam, na Alemanha. "Há provavelmente outras estrelas tão brilhantes, se não mais brilhantes, que permanecem escondidas de nossa visão".
Segundo os pesquisadores, Peony está madura o suficiente para explodir em breve, em um processo chamado supernova --"breve", em astronomia pode ser qualquer período entre agora e milhões de anos, ressalvam os pesquisadores.
"Quando essa estrela explodir, vai evaporar qualquer planeta orbitando nas adjacências", afirma Oskinova.
Marte: agua en casi todas partes
El Mundo (Madrid)
Reconstrucción en 3-D de la concentración de los filosilicatos en la región 'Nili Fossae' de Marte. (Foto: NASA | Brown University)
La zona de color en el la fotografía muestra el delta del cráter 'Jezero', que pudo haber sido un lago. (Foto: NASA | Brown University)
MADRID.- Los últimos datos recogidos por la 'Mars Reconnaissance Orbiter' (MRO), apuntan a que en Marte existe mucha más variedad de minerales de lo que hasta ahora se creía.
Los resultados de la investigación dirigida por John Mustard de la Universidad de Brown y publicada en la revista 'Nature', indican la existencia de procesos hidrológicos activos y penetrantes en la época temprana del planeta a través de toda su corteza, incluyendo la superficie.
Los instrumentos a bordo del MRO han permitido a los científicos ampliar sus conocimientos sobre el distante pasado acuoso del planeta rojo. Tras analizar por primera vez muestras obtenidas por el orbitador, Mustard y sus colegas han encontrado que vastas regiones de las antiguas tierras altas antiguas del sur del planeta se caracterizaron por ser ambientes ricos en agua.
El equipo de investigadores ha descubierto que el agua sobre el antiguo Marte estaba siempre en constante trabajo, lo que generaba cambios en los minerales tanto subterráneos como de la superficie.
El hallazgo sobre el planeta de minerales de silicato hidratado, llamados filosilicatos, permite conservar un registro de interacciones pasadas entre el agua líquida y las rocas.
La presencia de filosilicatos, que forman parte de una reducida gama de la mineralogía y que presentan un hábito hojoso o escamoso como rasgo común, está restringida a terrenos antiguos que datan de la era geológica más temprana de Marte, conocida como el 'Noachian', que data de entre 4.6 y 3.8 miles de millones de años atrás.
Para desarrollar su investigación, el equipo recurrió a los datos suministrados por el 'Espectrómetro de Imagimática de Reconocimiento Compacto de Marte' (CRISM, por sus siglas en inglés). Los científicos analizaron la presencia de estos minerales localizados en cráteres, valles y dunas sobre toda la superficie del planeta, que son la prueba de la relación entre el agua y las rocas.
Entre los puntos en donde se encontraron los filosilicatos, destacan tres regiones, siendo la más notable la del cráter 'Jezero', la primera zona en la que se encontraron minerales "claramente influidos por el agua" y que pudo haber sido un lago, como explican los científicos.
El equipo ha explicado que los minerales encontrados se formaron temperaturas bajas (entre 100-200°C aproximadamente), un dato importante para entender la presencia de agua en el planeta. "De haber existido algún tipo de microorganismo en Marte, este tipo de ambiente hubiese sido ideal para su supervivencia", apuntan los científicos.
El estudio se publica en un momento en el que los descubrimientos de rastros de agua en Marte invaden los medios. Esta semana la ESA hizo públicas imágenes de 'Echus Chasma', una de las zonas más extensas que presenta rastros de la existencia de agua en el planeta, capturadas por la cámara de alta resolución de la nave de 'Mars Express'.
Reconstrucción en 3-D de la concentración de los filosilicatos en la región 'Nili Fossae' de Marte. (Foto: NASA | Brown University)
La zona de color en el la fotografía muestra el delta del cráter 'Jezero', que pudo haber sido un lago. (Foto: NASA | Brown University)
MADRID.- Los últimos datos recogidos por la 'Mars Reconnaissance Orbiter' (MRO), apuntan a que en Marte existe mucha más variedad de minerales de lo que hasta ahora se creía.
Los resultados de la investigación dirigida por John Mustard de la Universidad de Brown y publicada en la revista 'Nature', indican la existencia de procesos hidrológicos activos y penetrantes en la época temprana del planeta a través de toda su corteza, incluyendo la superficie.
Los instrumentos a bordo del MRO han permitido a los científicos ampliar sus conocimientos sobre el distante pasado acuoso del planeta rojo. Tras analizar por primera vez muestras obtenidas por el orbitador, Mustard y sus colegas han encontrado que vastas regiones de las antiguas tierras altas antiguas del sur del planeta se caracterizaron por ser ambientes ricos en agua.
El equipo de investigadores ha descubierto que el agua sobre el antiguo Marte estaba siempre en constante trabajo, lo que generaba cambios en los minerales tanto subterráneos como de la superficie.
El hallazgo sobre el planeta de minerales de silicato hidratado, llamados filosilicatos, permite conservar un registro de interacciones pasadas entre el agua líquida y las rocas.
La presencia de filosilicatos, que forman parte de una reducida gama de la mineralogía y que presentan un hábito hojoso o escamoso como rasgo común, está restringida a terrenos antiguos que datan de la era geológica más temprana de Marte, conocida como el 'Noachian', que data de entre 4.6 y 3.8 miles de millones de años atrás.
Para desarrollar su investigación, el equipo recurrió a los datos suministrados por el 'Espectrómetro de Imagimática de Reconocimiento Compacto de Marte' (CRISM, por sus siglas en inglés). Los científicos analizaron la presencia de estos minerales localizados en cráteres, valles y dunas sobre toda la superficie del planeta, que son la prueba de la relación entre el agua y las rocas.
Entre los puntos en donde se encontraron los filosilicatos, destacan tres regiones, siendo la más notable la del cráter 'Jezero', la primera zona en la que se encontraron minerales "claramente influidos por el agua" y que pudo haber sido un lago, como explican los científicos.
El equipo ha explicado que los minerales encontrados se formaron temperaturas bajas (entre 100-200°C aproximadamente), un dato importante para entender la presencia de agua en el planeta. "De haber existido algún tipo de microorganismo en Marte, este tipo de ambiente hubiese sido ideal para su supervivencia", apuntan los científicos.
El estudio se publica en un momento en el que los descubrimientos de rastros de agua en Marte invaden los medios. Esta semana la ESA hizo públicas imágenes de 'Echus Chasma', una de las zonas más extensas que presenta rastros de la existencia de agua en el planeta, capturadas por la cámara de alta resolución de la nave de 'Mars Express'.
Le cerveau dans tous ses états (3/5) - L'addiction, du sable dans les rouages neuronaux
Le Temps (Genève)
por Marie-Christine Petit-Pierre
On peut être «accro» à de nombreuses substances - cocaïne, nicotine, alcool -, mais aussi au sexe ou encore au jeu. Toutefois, au niveau du cerveau, il s'agit bien d'une seule et même maladie car elle concerne les mêmes structures nerveuses. Soit des modifications au niveau de la synapse, la zone de contact fonctionnelle entre deux neurones.
L'addiction, selon les avancées récentes des neurosciences, est donc liée à des changements au niveau de la transmission des informations dans le cerveau. Tout comme la dépression, les troubles anxieux, la maladie d'Alzheimer, l'autisme et, probablement, le syndrome post-traumatique. Autant d'affections regroupées dans une nouvelle famille de maladies du cerveau: les maladies synaptiques.
Dans la maladie d'Alzheimer par exemple, l'affection observée est une détérioration de la synapse alors que pour l'addiction, la cause est, à l'inverse, une modulation anormale de la transmission neuronale. L'on sait depuis longtemps que ce phénomène, appelé plasticité synaptique, est essentiel à l'apprentissage et à la mémoire. Mais, sous l'effet de la drogue, il survient en excès et exacerbe l'activation de certaines régions du cerveau.
Le thème des maladies synaptiques suscite un immense intérêt de la communauté scientifique. Il a donné lieu à un symposium spécial en marge du Forum européen de neurosciences (FENS) qui s'achève aujourd'hui à Genève.
L'explication de la «mécanique» de l'addiction présente un intérêt extraordinaire car elle fait entrevoir des possibilités thérapeutiques. Et l'Organisation mondiale de la santé, qui classe désormais l'addiction parmi les affections du cerveau, souhaite une prise de conscience au sujet des processus biologique qui sous-tendent cette affection. Les enjeux sont importants. Selon un rapport de l'European Brain Council, un Européen sur quatre souffre d'une maladie du cerveau (deux millions en Suisse). Et neuf millions sont touchés par l'addiction. Une maladie qui engendre un coût estimé à 57 milliards d'euros par an. Il s'agit donc d'un problème majeur de santé publique.
Christian Lüscher, de la Faculté de médecine de l'Université de Genève, est l'un des chercheurs de pointe dans ce domaine en Suisse. Avec son équipe, il a décrit en 2006 la manière dont la cocaïne modifie chez la souris les propriétés de transmission de l'information nerveuse aux synapses. Cela de manière durable et dès la première prise de drogue. En 2007, les suites de cette étude montraient aussi - c'est la bonne nouvelle - que ce remodelage des synapses est réversible. Les chercheurs ont en effet montré que les synapses pouvaient se débarrasser des récepteurs altérés par la cocaïne et les remplacer par de nouveaux récepteurs, ce qui rétablit une communication normale entre les cellules nerveuses.
Dans l'étude, cette restauration a été induite par une molécule chimique de la société Roche. «Elle restaurait dans un premier temps la transmission normale entre les neurones. Mais on ne connaît pas les conséquences sur le comportement. Puis cette molécule a été revendue à une start-up américaine. Depuis, je n'en ai plus entendu parler.»
Par contre, poursuit le scientifique, «un article récemment paru dans la revue Nature montre, chez l'animal, que l'on peut bloquer la modification qui intervient au niveau de la synapse après la prise de cocaïne, cela au niveau d'une région du cerveau appelé noyau accumbens (voir infographie). Cela stoppe chez l'animal une des composantes du comportement addictif, soit la pulsion à consommer lorsqu'il est soumis à un stimulus conditionné (en lien avec la prise de la substance, ndlr). Mais cette substance est inutilisable pour l'homme, si bien qu'il reste beaucoup de recherches à faire avant de proposer de nouvelles thérapies». Néanmoins, cette étude montre encore une fois que l'on peut agir de manière chimique sur le comportement addictif, ce qui ouvre des perspectives thérapeutiques intéressantes.
Le cerveau humain comporte des milliards de neurones qui communiquent entre eux. Et la synapse correspond donc à la zone de contact fonctionnelle entre deux neurones. A ce niveau, la communication, qui circule d'ordinaire sous forme de courants électriques dans le système nerveux, se fait de manière chimique. En d'autres termes, l'influx nerveux électrique arrivant d'un premier neurone est traduit en messages chimiques, par l'intermédiaire de neurotransmetteurs. Des messages qui sont alors transférés au second neurone. La dopamine est l'un de ces neurotransmetteurs. Elle est connue comme la molécule du plaisir ou de la récompense. Une association un peu galvaudée, selon Christian Lüscher. Car il semblerait que la libération de la dopamine est surtout associée à des mécanismes d'apprentissage liés à l'obtention d'une récompense.
La distinction peut sembler un peu maniaque, mais elle permet une bien meilleure explication des mécanismes de l'addiction. Il y a quelques années, une étude sur les singes a montré que lorsqu'ils recevaient une récompense inattendue, cela déclenchait chez eux un pic de libération de dopamine. A l'inverse, lorsque la récompense promise n'était pas obtenue, les neurones dopaminergiques étaient totalement inhibés. Enfin, lorsque la même récompense était anticipée par les animaux, l'activité de ces neurones était peu modifiée. Preuve était faite que la dopamine incite l'individu à prendre des risques pour obtenir une récompense de façon certaine.
Il s'agit d'un mécanisme extrêmement important: dans un milieu naturel, l'apprentissage de comportements nécessaires à la survie de l'espèce est récompensé par l'obtention de nourriture et par la possibilité de se reproduire.
Ce système de récompense trouve son origine dans une structure localisée au sommet du tronc cérébral, l'aire tegmentale ventrale (ATV). Elle est connectée avec le cortex préfrontal et le noyau accumbens. La transmission de l'information entre l'ATV et ses structures cibles fait donc intervenir la dopamine. Or la recherche récente a montré que les drogues addictives ont la capacité d'augmenter fortement la libération de dopamine dans le noyau accumbens, en activant des neurones dopaminergiques de l'ATV.
La libération de la dopamine chez les consommateurs de substances addictives n'est ainsi plus liée à la récompense, donc à l'encouragement d'un apprentissage, mais bien à la seule prise de drogue. Et c'est là que réside le problème, car la libération de dopamine survient même si elle est attendue, sans être associée à un apprentissage. De plus, la quantité de dopamine libérée est bien plus importante que celle engendrée par une récompense «naturelle».
Ce détournement du système conduit à un emballement des mécanismes d'apprentissage. Et pousse à une consommation compulsive. Cette spirale est également valable dans les jeux de hasard où la récompense est, par essence, imprévisible. Cette situation active les neurones dopaminergiques. Comme la probabilité de gagner n'évolue pas dans ce type de jeu, l'apprentissage est impossible et le système ne se calme pas. Dans cette activité, c'est la mise qui fait office de dose. La similarité de ces mécanismes d'addiction permettrait ainsi d'expliquer la polyaddiction de certains patients (jeux, alcool et nicotine).
Par ailleurs, si les modifications au niveau des synapses commencent dans l'aire tegmentale ventrale, elles finissent par s'étendre aux autres aires du cerveau avec la répétition de la prise de drogue. Il est d'ailleurs possible de bloquer la spirale de l'addiction en intervenant chirurgicalement au niveau des connexions synaptiques. Une intervention bien sûr inapplicable dans un but thérapeutique, mais qui démontre les mécanismes à l'œuvre.
Ces découvertes ne sont pas suffisantes pour expliquer l'ensemble du phénomène d'addiction. «Finalement, seule une personne sur cinq devient «accro» en consommant des substances addictives. Et certaines résistent à une exposition intensive et chronique. Sont-elles capables de réparer leurs connexions? Il y a certainement des mécanismes endogènes qui les protègent et que l'on pourrait peut-être activer dans les thérapies comportementales», suggère Christian Lüscher.
De nombreux éléments du puzzle manquent encore. Mais les progrès des neurosciences permettent déjà d'envisager plusieurs axes de recherches pour trouver, à terme, des solutions thérapeutiques. Par ailleurs, ces processus d'apprentissage pathologiques représentent un fil d'Ariane pour une meilleure compréhension des processus d'apprentissage et de mémorisation.
Hémisphère culturel Aux confins de la conscience créatrice
Laurent Wolf
De l'alcool à l'opium en passant par le cannabis et la mescaline, les psychotropes accompagnent l'activité artistique en Europe, surtout depuis le XIXe siècle, en raison d'une exception sociale qui permet à certaines catégories de personnes de braver les interdits et, dans ce cas, d'incarner radicalement la liberté individuelle. L'addiction, et ses conséquences parfois dramatiques, colle au mythe de l'artiste qui affronterait seul ses démons et les démons de la société en plongeant dans les arcanes secrets de son esprit, autrement dit, pour employer le langage des sciences dures d'aujourd'hui, dans son cerveau. Sous des formes modérées ou extrêmes, elle constitue un signe de reconnaissance.
Dans la première partie du XIXe siècle, le Club des haschischin regroupa des écrivains comme Baudelaire, Gautier, Balzac ou Dumas. La consommation de cannabis et d'autres drogues exotiques correspond à la recherche de nouveaux territoires artistiques au-delà des frontières de notre civilisation.
Au XXe siècle, un écrivain-peintre, Henri Michaux (1899-1984), entreprend d'explorer sur lui-même et dans des conditions contrôlées, les effets des drogues bien avant l'époque psychédélique, en particulier ceux de la mescaline (le peyotl), utilisée par de nombreuses religions chamaniques. Il en tirera plusieurs livres (notamment L'Infini turbulent - 1957, Connaissance par les gouffres - 1961, et Misérable miracle - 1972) et une foule de peintures (ci-dessus); une exploration de l'empire des drogues, de leur usage et de leurs effets sur un projet poétique et plastique structuré. Il en tire une visite aux confins de la conscience et dans les sous-sols des cultures éloignées. Ce n'est pas un éloge de l'addiction (après l'usage de drogues, même celles qui ne provoquent pas de déchéance physique, comme l'héroïne ou la morphine, «il devient difficile de retrouver l'amour dans sa naïveté», dit-il). Mais les épreuves qu'Henri Michaux s'est imposées montrent que la transgression des restrictions morales soutenues par la science donne, aujourd'hui comme hier, accès à de nombreux mondes humains que nous préférons le plus souvent ignorer.
por Marie-Christine Petit-Pierre
On peut être «accro» à de nombreuses substances - cocaïne, nicotine, alcool -, mais aussi au sexe ou encore au jeu. Toutefois, au niveau du cerveau, il s'agit bien d'une seule et même maladie car elle concerne les mêmes structures nerveuses. Soit des modifications au niveau de la synapse, la zone de contact fonctionnelle entre deux neurones.
L'addiction, selon les avancées récentes des neurosciences, est donc liée à des changements au niveau de la transmission des informations dans le cerveau. Tout comme la dépression, les troubles anxieux, la maladie d'Alzheimer, l'autisme et, probablement, le syndrome post-traumatique. Autant d'affections regroupées dans une nouvelle famille de maladies du cerveau: les maladies synaptiques.
Dans la maladie d'Alzheimer par exemple, l'affection observée est une détérioration de la synapse alors que pour l'addiction, la cause est, à l'inverse, une modulation anormale de la transmission neuronale. L'on sait depuis longtemps que ce phénomène, appelé plasticité synaptique, est essentiel à l'apprentissage et à la mémoire. Mais, sous l'effet de la drogue, il survient en excès et exacerbe l'activation de certaines régions du cerveau.
Le thème des maladies synaptiques suscite un immense intérêt de la communauté scientifique. Il a donné lieu à un symposium spécial en marge du Forum européen de neurosciences (FENS) qui s'achève aujourd'hui à Genève.
L'explication de la «mécanique» de l'addiction présente un intérêt extraordinaire car elle fait entrevoir des possibilités thérapeutiques. Et l'Organisation mondiale de la santé, qui classe désormais l'addiction parmi les affections du cerveau, souhaite une prise de conscience au sujet des processus biologique qui sous-tendent cette affection. Les enjeux sont importants. Selon un rapport de l'European Brain Council, un Européen sur quatre souffre d'une maladie du cerveau (deux millions en Suisse). Et neuf millions sont touchés par l'addiction. Une maladie qui engendre un coût estimé à 57 milliards d'euros par an. Il s'agit donc d'un problème majeur de santé publique.
Christian Lüscher, de la Faculté de médecine de l'Université de Genève, est l'un des chercheurs de pointe dans ce domaine en Suisse. Avec son équipe, il a décrit en 2006 la manière dont la cocaïne modifie chez la souris les propriétés de transmission de l'information nerveuse aux synapses. Cela de manière durable et dès la première prise de drogue. En 2007, les suites de cette étude montraient aussi - c'est la bonne nouvelle - que ce remodelage des synapses est réversible. Les chercheurs ont en effet montré que les synapses pouvaient se débarrasser des récepteurs altérés par la cocaïne et les remplacer par de nouveaux récepteurs, ce qui rétablit une communication normale entre les cellules nerveuses.
Dans l'étude, cette restauration a été induite par une molécule chimique de la société Roche. «Elle restaurait dans un premier temps la transmission normale entre les neurones. Mais on ne connaît pas les conséquences sur le comportement. Puis cette molécule a été revendue à une start-up américaine. Depuis, je n'en ai plus entendu parler.»
Par contre, poursuit le scientifique, «un article récemment paru dans la revue Nature montre, chez l'animal, que l'on peut bloquer la modification qui intervient au niveau de la synapse après la prise de cocaïne, cela au niveau d'une région du cerveau appelé noyau accumbens (voir infographie). Cela stoppe chez l'animal une des composantes du comportement addictif, soit la pulsion à consommer lorsqu'il est soumis à un stimulus conditionné (en lien avec la prise de la substance, ndlr). Mais cette substance est inutilisable pour l'homme, si bien qu'il reste beaucoup de recherches à faire avant de proposer de nouvelles thérapies». Néanmoins, cette étude montre encore une fois que l'on peut agir de manière chimique sur le comportement addictif, ce qui ouvre des perspectives thérapeutiques intéressantes.
Le cerveau humain comporte des milliards de neurones qui communiquent entre eux. Et la synapse correspond donc à la zone de contact fonctionnelle entre deux neurones. A ce niveau, la communication, qui circule d'ordinaire sous forme de courants électriques dans le système nerveux, se fait de manière chimique. En d'autres termes, l'influx nerveux électrique arrivant d'un premier neurone est traduit en messages chimiques, par l'intermédiaire de neurotransmetteurs. Des messages qui sont alors transférés au second neurone. La dopamine est l'un de ces neurotransmetteurs. Elle est connue comme la molécule du plaisir ou de la récompense. Une association un peu galvaudée, selon Christian Lüscher. Car il semblerait que la libération de la dopamine est surtout associée à des mécanismes d'apprentissage liés à l'obtention d'une récompense.
La distinction peut sembler un peu maniaque, mais elle permet une bien meilleure explication des mécanismes de l'addiction. Il y a quelques années, une étude sur les singes a montré que lorsqu'ils recevaient une récompense inattendue, cela déclenchait chez eux un pic de libération de dopamine. A l'inverse, lorsque la récompense promise n'était pas obtenue, les neurones dopaminergiques étaient totalement inhibés. Enfin, lorsque la même récompense était anticipée par les animaux, l'activité de ces neurones était peu modifiée. Preuve était faite que la dopamine incite l'individu à prendre des risques pour obtenir une récompense de façon certaine.
Il s'agit d'un mécanisme extrêmement important: dans un milieu naturel, l'apprentissage de comportements nécessaires à la survie de l'espèce est récompensé par l'obtention de nourriture et par la possibilité de se reproduire.
Ce système de récompense trouve son origine dans une structure localisée au sommet du tronc cérébral, l'aire tegmentale ventrale (ATV). Elle est connectée avec le cortex préfrontal et le noyau accumbens. La transmission de l'information entre l'ATV et ses structures cibles fait donc intervenir la dopamine. Or la recherche récente a montré que les drogues addictives ont la capacité d'augmenter fortement la libération de dopamine dans le noyau accumbens, en activant des neurones dopaminergiques de l'ATV.
La libération de la dopamine chez les consommateurs de substances addictives n'est ainsi plus liée à la récompense, donc à l'encouragement d'un apprentissage, mais bien à la seule prise de drogue. Et c'est là que réside le problème, car la libération de dopamine survient même si elle est attendue, sans être associée à un apprentissage. De plus, la quantité de dopamine libérée est bien plus importante que celle engendrée par une récompense «naturelle».
Ce détournement du système conduit à un emballement des mécanismes d'apprentissage. Et pousse à une consommation compulsive. Cette spirale est également valable dans les jeux de hasard où la récompense est, par essence, imprévisible. Cette situation active les neurones dopaminergiques. Comme la probabilité de gagner n'évolue pas dans ce type de jeu, l'apprentissage est impossible et le système ne se calme pas. Dans cette activité, c'est la mise qui fait office de dose. La similarité de ces mécanismes d'addiction permettrait ainsi d'expliquer la polyaddiction de certains patients (jeux, alcool et nicotine).
Par ailleurs, si les modifications au niveau des synapses commencent dans l'aire tegmentale ventrale, elles finissent par s'étendre aux autres aires du cerveau avec la répétition de la prise de drogue. Il est d'ailleurs possible de bloquer la spirale de l'addiction en intervenant chirurgicalement au niveau des connexions synaptiques. Une intervention bien sûr inapplicable dans un but thérapeutique, mais qui démontre les mécanismes à l'œuvre.
Ces découvertes ne sont pas suffisantes pour expliquer l'ensemble du phénomène d'addiction. «Finalement, seule une personne sur cinq devient «accro» en consommant des substances addictives. Et certaines résistent à une exposition intensive et chronique. Sont-elles capables de réparer leurs connexions? Il y a certainement des mécanismes endogènes qui les protègent et que l'on pourrait peut-être activer dans les thérapies comportementales», suggère Christian Lüscher.
De nombreux éléments du puzzle manquent encore. Mais les progrès des neurosciences permettent déjà d'envisager plusieurs axes de recherches pour trouver, à terme, des solutions thérapeutiques. Par ailleurs, ces processus d'apprentissage pathologiques représentent un fil d'Ariane pour une meilleure compréhension des processus d'apprentissage et de mémorisation.
Hémisphère culturel Aux confins de la conscience créatrice
Laurent Wolf
De l'alcool à l'opium en passant par le cannabis et la mescaline, les psychotropes accompagnent l'activité artistique en Europe, surtout depuis le XIXe siècle, en raison d'une exception sociale qui permet à certaines catégories de personnes de braver les interdits et, dans ce cas, d'incarner radicalement la liberté individuelle. L'addiction, et ses conséquences parfois dramatiques, colle au mythe de l'artiste qui affronterait seul ses démons et les démons de la société en plongeant dans les arcanes secrets de son esprit, autrement dit, pour employer le langage des sciences dures d'aujourd'hui, dans son cerveau. Sous des formes modérées ou extrêmes, elle constitue un signe de reconnaissance.
Dans la première partie du XIXe siècle, le Club des haschischin regroupa des écrivains comme Baudelaire, Gautier, Balzac ou Dumas. La consommation de cannabis et d'autres drogues exotiques correspond à la recherche de nouveaux territoires artistiques au-delà des frontières de notre civilisation.
Au XXe siècle, un écrivain-peintre, Henri Michaux (1899-1984), entreprend d'explorer sur lui-même et dans des conditions contrôlées, les effets des drogues bien avant l'époque psychédélique, en particulier ceux de la mescaline (le peyotl), utilisée par de nombreuses religions chamaniques. Il en tirera plusieurs livres (notamment L'Infini turbulent - 1957, Connaissance par les gouffres - 1961, et Misérable miracle - 1972) et une foule de peintures (ci-dessus); une exploration de l'empire des drogues, de leur usage et de leurs effets sur un projet poétique et plastique structuré. Il en tire une visite aux confins de la conscience et dans les sous-sols des cultures éloignées. Ce n'est pas un éloge de l'addiction (après l'usage de drogues, même celles qui ne provoquent pas de déchéance physique, comme l'héroïne ou la morphine, «il devient difficile de retrouver l'amour dans sa naïveté», dit-il). Mais les épreuves qu'Henri Michaux s'est imposées montrent que la transgression des restrictions morales soutenues par la science donne, aujourd'hui comme hier, accès à de nombreux mondes humains que nous préférons le plus souvent ignorer.
La petite histoire des matières premières (2/10)
Le Temps (Genève)
En 1974, une bulle oubliée faisait caraméliser les cours du sucre
PRODUITS TROPICAUX. L'envolée des denrées agricoles ne date pas de ces derniers mois. Au début des années 70 les prix du sucre avaient été multipliés par près de 50. Déjà la pénurie menaçait...
por Emmanuel Garessus
Un boom des matières premières? Le sucre se traite 85% en dessous de son record historique de 1974! Ces derniers mois son cours a certes légèrement profité de l'engouement général pour les «commodities». Mais si peu. Surtout au regard de l'explosion du prix de 1974, qui mérite d'entrer dans l'histoire des bulles spéculatives. Au rang des personnalités qui ont su acheter au plus bas - et vendre au meilleur moment - on sera surpris de rencontrer François Pinault, l'homme à l'origine du groupe français PPR. Ce fils de paysan, qui avait quitté l'école avec le mépris des diplômes et plus tard repris la scierie de son beau-père, se bâtit une réputation de repreneur local en 1970.
Le coup de François Pinault
C'est un «tuyau» fourni par Roland Gadala, administrateur de Peugeot et de Saint-Gobain, qui permet à Pinault de réaliser son premier gros coup, selon la biographie de Pierre-Angel Gay et Caroline Monnot. Le sucre passe en effet de 1,4 cent la livre à 66,5 cents entre 1966 et son sommet de novembre 1974, une multiplication par 47. Georges Conchon en fait un livre et Jacques Rouffio un film mémorable, avec Gérard Depardieu dans le rôle du truculent conseiller financier, et Jean Carmet celui d'un inspecteur des impôts qui perd toute sa fortune.
L'histoire de cette spéculation s'explique par une subite réduction de l'offre de ce que les Perses, au VIe siècle av. J.-C., nommèrent «le roseau qui donne le miel sans le concours des abeilles». A la fin 1972, le marché a connu quatre excellentes récoltes successives. Et pourtant la consommation parvient à dépasser la production. Et mange les stocks accumulés. La demande est également soutenue par le retrait en 1969 du cyclamate - un substitut artificiel - par les autorités américaines de surveillance (FDA) en raison d'un risque de cancer.
Vols à l'étalage
Au début 1974, la hausse des prix fait s'envoler les rumeurs. De grands acheteurs constitueraient des stocks pour anticiper la poursuite de la tendance. Le mouvement atteint le consommateur. On dérobe des morceaux dans les magasins. Les invités offrent à leur hôte non plus une bouteille mais des paquets de sucre. Selon Jim Rogers, le célèbre investisseur et auteur de Hot commodities, les courtiers en sucre n'avaient pas alors une idée claire des raisons de cet engouement. Une rareté de la main-d'œuvre pour la récolte de canne? Une médiocre récolte de betteraves en Europe? Certains suspectent les mauvaises récoltes en Union soviétique. En pleine crise pétrolière, les capitaux arabes sont également soupçonnés de spéculer sur d'autres matières premières et de faire monter les cours. L'explosion du prix pénalise tout de même la demande à l'automne 1974. Et lorsque Washington publie une loi pour protéger ses producteurs, les cours sont déjà en train de plonger. En janvier 1977 le cours oscille à nouveau entre 7 et 9 cents. Cet été, il se traite à 14 cents.
Fiche signalétique: sucre
Emmanuel Garessus
Sur la campagne 2007-08, la production de sucre devrait atteindre 170 millions de tonnes selon la Cnuced, soit une augmentation de 2,6% par rapport à la précédente. Les besoins mondiaux, en hausse de 2,7%, représenteront quant à eux 159 millions de tonnes. Les stocks disponibles représentent environ la moitié de la consommation.
Le Brésil est clairement le premier producteur - et premier exportateur - avec 34 millions de tonnes, devant l'Union européenne (27 millions de tonnes), l'Inde (17 millions) et la Chine (12 millions). Les producteurs européens bénéficient d'un prix garanti, trois fois plus élevé que le cours mondial, dans le cadre de la PAC. Ce régime a été remis en cause par l'OMC en avril 2005.
En termes de consommation, c'est encore le Brésil qui arrive en tête (56 kg par habitant), en raison de sa production de bioéthanol. L'Union européenne est à 35 kg, les Etats-Unis en dessous de 30 kg. Environ les sept dixièmes de la production sont consommés dans le pays d'origine.
En 1974, une bulle oubliée faisait caraméliser les cours du sucre
PRODUITS TROPICAUX. L'envolée des denrées agricoles ne date pas de ces derniers mois. Au début des années 70 les prix du sucre avaient été multipliés par près de 50. Déjà la pénurie menaçait...
por Emmanuel Garessus
Un boom des matières premières? Le sucre se traite 85% en dessous de son record historique de 1974! Ces derniers mois son cours a certes légèrement profité de l'engouement général pour les «commodities». Mais si peu. Surtout au regard de l'explosion du prix de 1974, qui mérite d'entrer dans l'histoire des bulles spéculatives. Au rang des personnalités qui ont su acheter au plus bas - et vendre au meilleur moment - on sera surpris de rencontrer François Pinault, l'homme à l'origine du groupe français PPR. Ce fils de paysan, qui avait quitté l'école avec le mépris des diplômes et plus tard repris la scierie de son beau-père, se bâtit une réputation de repreneur local en 1970.
Le coup de François Pinault
C'est un «tuyau» fourni par Roland Gadala, administrateur de Peugeot et de Saint-Gobain, qui permet à Pinault de réaliser son premier gros coup, selon la biographie de Pierre-Angel Gay et Caroline Monnot. Le sucre passe en effet de 1,4 cent la livre à 66,5 cents entre 1966 et son sommet de novembre 1974, une multiplication par 47. Georges Conchon en fait un livre et Jacques Rouffio un film mémorable, avec Gérard Depardieu dans le rôle du truculent conseiller financier, et Jean Carmet celui d'un inspecteur des impôts qui perd toute sa fortune.
L'histoire de cette spéculation s'explique par une subite réduction de l'offre de ce que les Perses, au VIe siècle av. J.-C., nommèrent «le roseau qui donne le miel sans le concours des abeilles». A la fin 1972, le marché a connu quatre excellentes récoltes successives. Et pourtant la consommation parvient à dépasser la production. Et mange les stocks accumulés. La demande est également soutenue par le retrait en 1969 du cyclamate - un substitut artificiel - par les autorités américaines de surveillance (FDA) en raison d'un risque de cancer.
Vols à l'étalage
Au début 1974, la hausse des prix fait s'envoler les rumeurs. De grands acheteurs constitueraient des stocks pour anticiper la poursuite de la tendance. Le mouvement atteint le consommateur. On dérobe des morceaux dans les magasins. Les invités offrent à leur hôte non plus une bouteille mais des paquets de sucre. Selon Jim Rogers, le célèbre investisseur et auteur de Hot commodities, les courtiers en sucre n'avaient pas alors une idée claire des raisons de cet engouement. Une rareté de la main-d'œuvre pour la récolte de canne? Une médiocre récolte de betteraves en Europe? Certains suspectent les mauvaises récoltes en Union soviétique. En pleine crise pétrolière, les capitaux arabes sont également soupçonnés de spéculer sur d'autres matières premières et de faire monter les cours. L'explosion du prix pénalise tout de même la demande à l'automne 1974. Et lorsque Washington publie une loi pour protéger ses producteurs, les cours sont déjà en train de plonger. En janvier 1977 le cours oscille à nouveau entre 7 et 9 cents. Cet été, il se traite à 14 cents.
Fiche signalétique: sucre
Emmanuel Garessus
Sur la campagne 2007-08, la production de sucre devrait atteindre 170 millions de tonnes selon la Cnuced, soit une augmentation de 2,6% par rapport à la précédente. Les besoins mondiaux, en hausse de 2,7%, représenteront quant à eux 159 millions de tonnes. Les stocks disponibles représentent environ la moitié de la consommation.
Le Brésil est clairement le premier producteur - et premier exportateur - avec 34 millions de tonnes, devant l'Union européenne (27 millions de tonnes), l'Inde (17 millions) et la Chine (12 millions). Les producteurs européens bénéficient d'un prix garanti, trois fois plus élevé que le cours mondial, dans le cadre de la PAC. Ce régime a été remis en cause par l'OMC en avril 2005.
En termes de consommation, c'est encore le Brésil qui arrive en tête (56 kg par habitant), en raison de sa production de bioéthanol. L'Union européenne est à 35 kg, les Etats-Unis en dessous de 30 kg. Environ les sept dixièmes de la production sont consommés dans le pays d'origine.
terça-feira, julho 15, 2008
Indice de hoje
- La petite histoire des matières premières (1/10) (Le Temps, Genève)
- Le cerveau dans tous ses états (2/5) - A quoi bon dormir? (Le Temps, Genève)
- Le cerveau dans tous ses états (2/5) - A quoi bon dormir? (Le Temps, Genève)
Le cerveau dans tous ses états (2/5) - A quoi bon dormir?
Le Temps (Genève)
por Olivier Dessibourg
«Le sommeil occupe le tiers de notre vie. Il est la consolation des peines de nos journées ou la peine de leurs plaisirs, a écrit Gérard de Nerval. Mais je n'ai jamais éprouvé que le sommeil fût un repos.» Il ne l'est en tout cas pas pour le cerveau! Car si, après avoir fermé les yeux, tout dormeur passe d'abord par des phases de sommeil lent, léger puis profond, son cortex s'«allume» ensuite à nouveau; ses neurones fourmillent d'activité. Une phase dès lors appelée sommeil «paradoxal».
Le cycle se répète quatre à six fois durant la nuit. Mais en quoi le cerveau en tire-t-il profit? Et à quoi dormir sert-il? Car, chez l'homme comme chez les animaux, l'inconvénient de rester immobile, vulnérable, et incapable de s'accoupler doit forcément être compensé par une utilité cruciale au point d'avoir été sélectionnée au fil de l'évolution. Récemment, les progrès de l'imagerie cérébrale ont permis plusieurs tentatives de réponses.
La première est que le cerveau met à profit le sommeil pour récupérer et recharger ses batteries, soit recréer ses stocks de sucres. «Cette hypothèse est un peu courte, analyse Mehdi Tafti, codirecteur du centre de recherches sur le sommeil à l'Université de Lausanne (UNIL). Car il faut physiologiquement cinq minutes pour écouler une quantité d'énergie accumulée durant quatre heures environ...»
Depuis peu, un faisceau d'indices indique que le sommeil sert avant tout au cerveau à consolider la mémoire des données emmagasinées durant la journée. L'une des expériences les plus connues a été menée il y une dizaine d'années à l'Université d'Arizona. Des neurobiologistes ont placé dans un labyrinthe des rats qui ont fini par en trouver la sortie. Or lorsque ceux-ci dormaient, les chercheurs ont observé que leur hippocampe, une structure impliquée dans la mémorisation à court terme, «rejouait» le film des événements.
Et Philippe Peigneux et Pierre Maquet de l'Université de Liège ont réédité l'exercice, mais avec des humains se déplaçant dans une ville virtuelle. A la clé, les mêmes conclusions: leur cerveau révisait durant la nuit les données apprises en activant les mêmes zones cérébrales. Mais si les sujets étaient privés de sommeil lent, leurs performances mémorielles baissaient.
Au Centre de neurosciences de l'Université de Genève, Sophie Schwartz a creusé un peu plus loin cette idée, cherchant, elle, à qualifier les empreintes de ces processus dans le cerveau en utilisant des méthodes récentes d'imagerie par résonance magnétique (IRM). Elle a présenté ses recherches hier à Genève lors du Forum européen de neurosciences (FENS). «Nos sujets devaient suivre, avec un joystick, une boule se déplaçant sur l'écran. Ils ne se rendaient pas compte que leur main, qui bougeait dans tous les sens, effectuait dans la direction horizontale un aller-retour régulier.» Leur cerveau, lui, finissait par remarquer cette règle cachée, et par l'apprendre durant la nuit suivante. Si bien que les participants qui dormaient devenaient imbattables à cette tâche, à l'inverse de ceux qui étaient privés de sommeil. Et ce résultat était clairement lisible dans l'activité du cerveau le lendemain.
«Avec ce type d'exercice, nous avons montré, pour la première fois chez l'homme, que c'est précisément la région du cerveau sollicitée pour une tâche spécifique qui voit son fonctionnement modifié de manière durable après une période de sommeil», dit Sophie Schwartz. Pour certains experts, comme Robert Stickgold (Harvard Medical School), le cerveau fait ainsi plus que renforcer la mémoire durant la nuit: «Il essaie d'extraire de la signification dans le flot des données acquises», explique-t-il dans la revue Science. C'est d'ailleurs aussi cette propriété qui expliquerait l'adage selon lequel «la nuit porte conseil»: des expériences ont montré que des sujets trouvaient au matin des solutions à des casse-tête qu'ils peinaient à résoudre la veille.
De plus, à chaque phase du sommeil semble être associé un type spécifique de consolidation. «Le sommeil lent profond serait plus favorable au renforcement de la mémoire explicite (ce qu'on apprend consciemment) tandis que le sommeil paradoxal aurait un rôle surtout dans la mémoire implicite (apprentissage inconscient)», dit Isabelle Arnulf, qui dirige l'Unité des pathologies du sommeil de l'hôpital Pitié-Salpêtrière, à Paris*.
Partant de cette constatation, une équipe de l'Université de Lübeck (Allemagne) s'est dit qu'il serait possible d'augmenter artificiellement ce processus, autrement dit de «booster» la mémoire! Avant de se coucher, des étudiants devaient apprendre des paires de mots. Durant la nuit, des électrodes étaient placées sur leur crâne. Lors des phases de sommeil profond, les chercheurs y ont envoyé des impulsions électriques (0,75 Hz), légères mais accordées sur les fréquences des ondes lentes émises par le cerveau, avec donc le but de les renforcer. Résultat, aussi présentés hier lors du FENS: les sujets présentaient bien une amélioration «modeste mais significative» de leur capacité de mémorisation!
Jerry Siegel, lui, ne croit pas à cette théorie. Ce chercheur de l'Université de Californie en veut pour preuve qu'il existe des mammifères - les orques, entre autres - qui ne dorment pas du tout durant les premiers mois de leur vie. De plus, la mémoire augmentant au mieux de 15% dans ces tests, il estime ce gain trop faible pour que cette fonction du sommeil ait eu une influence déterminante au fil de l'évolution. Enfin, assène-t-il, les gens qui prennent des antidépresseurs, des produits pouvant perturber le sommeil paradoxal, ne montrent pas de déficit majeur de la mémoire. Selon lui, le sommeil permet bêtement au cerveau de conserver de l'énergie; sa consommation en sucre chute de 11% à 40% durant le sommeil lent léger, respectivement profond.
Une autre hypothèse avance que le sommeil est un état indispensablepour garantir la plasticité du cerveau, et donc son bon développement. Giulio Tononi (Université du Wisconsin) y adhère en ajoutant son interprétation, controversée: la journée, les synapses, ces connexions entre neurones, se renforcent au fur et à mesure qu'affluent les stimuli, et consomment dès lors davantage d'énergie. Sans période de sommeil, les besoins du cerveau s'en trouveraient indéfiniment accrus. Par contre, dormir permettrait à ces synapses de s'«affaiblir» un peu. Le chercheur voit dans cette explication une fonction homéostatique: comme pour la faim, que signale le corps, le cerveau «sait» de lui même qu'il a besoin de sommeil tôt ou tard; le record du monde d'éveil chez un humain, datant de 1964, se monte à 11 jours.
A noter encore la «théorie de la simulation de la menace», de Antti Revonsuo (Université de Turku, Finlande). «Le rêve est un système naturel de «réalité virtuelle» produit par le cerveau, explique-t-elle dans le numéro de juin du magazine Sciences & Avenir. Ce système de simulation sert à nous entraîner à réagir aux situations dangereuses du quotidien. Ce serait une capacité héritée de nos ancêtres, qui aurait permis aux hommes d'apprendre à se défendre. Une fonction que l'évolution aurait sélectionnée.»
Cette théorie se base sur une explication physiologique des rêves: «Le cortex préfrontal est notamment le siège des capacités de raisonnement et de jugement, explique Sophie Schwartz. Or durant le sommeil, cette aire est désactivée. C'est pourquoi les rêves contiennent des êtres, objets ou situations étranges. Parallèlement, le système limbique, qui traite des émotions comme la peur, est très activé.»
Des rêves, les neuroscientifiques connaissent encore peu de chose. Si ce n'est qu'ils ont lieu durant toutes les phases du sommeil, et pas seulement durant le sommeil paradoxal, qui les rend néanmoins plus riches. Mais impossible, pour l'heure, d'établir par exemple un lien clair entre les mécanismes de consolidation de la mémoire et les rêves. «Pour cela, il faudrait mener des expériences de renforcement de la mémoire. Au moment où l'on voit s'allumer les aires concernées chez le sujet endormi, il faut le réveiller et lui demander de décrire ses rêves, en espérant que sa «vision» ait un lien avec la tâche entraînée la veille. Mais tout cela demande une infrastructure lourde.»
Si toutes ces théories comportent probablement une part de vérité, aucune d'entre elles n'est satisfaisante à elle seule. C'est pourquoi Mehdi Tafti, à l'UNIL, a souhaité reprendre les choses depuis le début: «Nous sommes parmi les premiers à avoir cherché des bases génétiques du sommeil», autrement dit des faits prouvant que chaque être vivant a ses besoins en sommeil inscrits dans ses gènes. Son équipe est aussi partie du principe que le sommeil est une fonction homéostatique, qui doit donc laisser des traces moléculaires si elle n'est pas satisfaite. «A ce jour, nous avons trouvé plusieurs gènes qui sont exprimés différemment en cas de privation de sommeil», indique le chercheur.
Les travaux se poursuivent dans ce domaine novateur. «Nous nous intéressons aussi aux bases génétiques d'affections comme le somnambulisme ou la narcolepsie, maladie pour laquelle un gène a été découvert il y a peu chez le chien», explique Mehdi Tafti. Qui caresse l'espoir que de nouveaux produits thérapeutiques ou une nouvelle génération de somnifère, laissant moins de traces dans le cerveau et permettant de mieux «lancer» le sommeil naturel, pourront bientôt être mis au point.
* «Comment dormons-nous?» coll. Les Petites Pommes du Savoir, no 104, Ed. Le Pommier, 64 pages. A lire aussi: «La fabrique de rêves»,de Sophie Schwartz. Ed. Le Pommier
Hémisphère culturel A la «Recherche» du sommeil perdu
Eléonore Sulser
«Peut-être même plus qu'un autre temps: une autre vie. Les plaisirs qu'on a dans le sommeil, on ne les fait pas figurer dans le compte des plaisirs éprouvés au cours de l'existence. [...] C'est comme du bien perdu.»
Il y a, cette citation le montre, comme une nostalgie perpétuelle du sommeil dans A la Recherche du temps perdu. «Longtemps je me suis couché de bonheur», la phrase inaugurale de l'œuvre monumentale, dit d'emblée que la vie endormie, tout comme la vie réelle, est d'une importance capitale pour Marcel Proust. La science rapproche aujourd'hui les deux phénomènes, or, tout comme la mémoire, le sommeil est un sujet central de La Recherche.
Sans doute parce que le sommeil est rare et précieux à son narrateur, Proust s'attache à le décrire avec précision. Et ses intuitions sont remarquables, comme le montre Fanny Déchanet-Platz dans L'Ecrivain, le sommeil et les rêves qui vient d'être publié chez Gallimard (lire Samedi Culturel du 7.6.08). Ainsi, Proust décrit dans La Prisonnière l'appropriation de la vie réelle par le cerveau endormi: «Il semble bien que le rêve soit fait [...] avec la matière parfois la plus grossière de la vie, mais cette matière y est traitée, malaxée de telle sorte [...] qu'on ne la reconnaît pas.» La dimension terrifiante du rêve, son lien avec les peurs primitives signalé par Antti Revonsuo (ci-dessus) ne lui échappent pas non plus dans Du Côté de chez Swann: «Ou bien en dormant, j'avais rejoint sans effort un âge à jamais révolu de ma vie primitive, retrouvé telle de mes terreurs enfantines comme celle que mon grand-oncle me tirât par les boucles [...]. Par mesure de précaution j'entourais complètement ma tête de mon oreiller avant de retourner dans le monde des rêves.» Marcel Proust, dont le narrateur ne cesse de lutter contre l'insomnie fait du sommeil un «bien perdu»; une composante du temps humain qui, tout comme les souvenirs, les sensations, les rêves, se dérobe et, à terme, menace de s'évanouir. Témoin que la littérature, comme la science, reste fascinée devant ce phénomène aussi familier qu'étrange.
por Olivier Dessibourg
«Le sommeil occupe le tiers de notre vie. Il est la consolation des peines de nos journées ou la peine de leurs plaisirs, a écrit Gérard de Nerval. Mais je n'ai jamais éprouvé que le sommeil fût un repos.» Il ne l'est en tout cas pas pour le cerveau! Car si, après avoir fermé les yeux, tout dormeur passe d'abord par des phases de sommeil lent, léger puis profond, son cortex s'«allume» ensuite à nouveau; ses neurones fourmillent d'activité. Une phase dès lors appelée sommeil «paradoxal».
Le cycle se répète quatre à six fois durant la nuit. Mais en quoi le cerveau en tire-t-il profit? Et à quoi dormir sert-il? Car, chez l'homme comme chez les animaux, l'inconvénient de rester immobile, vulnérable, et incapable de s'accoupler doit forcément être compensé par une utilité cruciale au point d'avoir été sélectionnée au fil de l'évolution. Récemment, les progrès de l'imagerie cérébrale ont permis plusieurs tentatives de réponses.
La première est que le cerveau met à profit le sommeil pour récupérer et recharger ses batteries, soit recréer ses stocks de sucres. «Cette hypothèse est un peu courte, analyse Mehdi Tafti, codirecteur du centre de recherches sur le sommeil à l'Université de Lausanne (UNIL). Car il faut physiologiquement cinq minutes pour écouler une quantité d'énergie accumulée durant quatre heures environ...»
Depuis peu, un faisceau d'indices indique que le sommeil sert avant tout au cerveau à consolider la mémoire des données emmagasinées durant la journée. L'une des expériences les plus connues a été menée il y une dizaine d'années à l'Université d'Arizona. Des neurobiologistes ont placé dans un labyrinthe des rats qui ont fini par en trouver la sortie. Or lorsque ceux-ci dormaient, les chercheurs ont observé que leur hippocampe, une structure impliquée dans la mémorisation à court terme, «rejouait» le film des événements.
Et Philippe Peigneux et Pierre Maquet de l'Université de Liège ont réédité l'exercice, mais avec des humains se déplaçant dans une ville virtuelle. A la clé, les mêmes conclusions: leur cerveau révisait durant la nuit les données apprises en activant les mêmes zones cérébrales. Mais si les sujets étaient privés de sommeil lent, leurs performances mémorielles baissaient.
Au Centre de neurosciences de l'Université de Genève, Sophie Schwartz a creusé un peu plus loin cette idée, cherchant, elle, à qualifier les empreintes de ces processus dans le cerveau en utilisant des méthodes récentes d'imagerie par résonance magnétique (IRM). Elle a présenté ses recherches hier à Genève lors du Forum européen de neurosciences (FENS). «Nos sujets devaient suivre, avec un joystick, une boule se déplaçant sur l'écran. Ils ne se rendaient pas compte que leur main, qui bougeait dans tous les sens, effectuait dans la direction horizontale un aller-retour régulier.» Leur cerveau, lui, finissait par remarquer cette règle cachée, et par l'apprendre durant la nuit suivante. Si bien que les participants qui dormaient devenaient imbattables à cette tâche, à l'inverse de ceux qui étaient privés de sommeil. Et ce résultat était clairement lisible dans l'activité du cerveau le lendemain.
«Avec ce type d'exercice, nous avons montré, pour la première fois chez l'homme, que c'est précisément la région du cerveau sollicitée pour une tâche spécifique qui voit son fonctionnement modifié de manière durable après une période de sommeil», dit Sophie Schwartz. Pour certains experts, comme Robert Stickgold (Harvard Medical School), le cerveau fait ainsi plus que renforcer la mémoire durant la nuit: «Il essaie d'extraire de la signification dans le flot des données acquises», explique-t-il dans la revue Science. C'est d'ailleurs aussi cette propriété qui expliquerait l'adage selon lequel «la nuit porte conseil»: des expériences ont montré que des sujets trouvaient au matin des solutions à des casse-tête qu'ils peinaient à résoudre la veille.
De plus, à chaque phase du sommeil semble être associé un type spécifique de consolidation. «Le sommeil lent profond serait plus favorable au renforcement de la mémoire explicite (ce qu'on apprend consciemment) tandis que le sommeil paradoxal aurait un rôle surtout dans la mémoire implicite (apprentissage inconscient)», dit Isabelle Arnulf, qui dirige l'Unité des pathologies du sommeil de l'hôpital Pitié-Salpêtrière, à Paris*.
Partant de cette constatation, une équipe de l'Université de Lübeck (Allemagne) s'est dit qu'il serait possible d'augmenter artificiellement ce processus, autrement dit de «booster» la mémoire! Avant de se coucher, des étudiants devaient apprendre des paires de mots. Durant la nuit, des électrodes étaient placées sur leur crâne. Lors des phases de sommeil profond, les chercheurs y ont envoyé des impulsions électriques (0,75 Hz), légères mais accordées sur les fréquences des ondes lentes émises par le cerveau, avec donc le but de les renforcer. Résultat, aussi présentés hier lors du FENS: les sujets présentaient bien une amélioration «modeste mais significative» de leur capacité de mémorisation!
Jerry Siegel, lui, ne croit pas à cette théorie. Ce chercheur de l'Université de Californie en veut pour preuve qu'il existe des mammifères - les orques, entre autres - qui ne dorment pas du tout durant les premiers mois de leur vie. De plus, la mémoire augmentant au mieux de 15% dans ces tests, il estime ce gain trop faible pour que cette fonction du sommeil ait eu une influence déterminante au fil de l'évolution. Enfin, assène-t-il, les gens qui prennent des antidépresseurs, des produits pouvant perturber le sommeil paradoxal, ne montrent pas de déficit majeur de la mémoire. Selon lui, le sommeil permet bêtement au cerveau de conserver de l'énergie; sa consommation en sucre chute de 11% à 40% durant le sommeil lent léger, respectivement profond.
Une autre hypothèse avance que le sommeil est un état indispensablepour garantir la plasticité du cerveau, et donc son bon développement. Giulio Tononi (Université du Wisconsin) y adhère en ajoutant son interprétation, controversée: la journée, les synapses, ces connexions entre neurones, se renforcent au fur et à mesure qu'affluent les stimuli, et consomment dès lors davantage d'énergie. Sans période de sommeil, les besoins du cerveau s'en trouveraient indéfiniment accrus. Par contre, dormir permettrait à ces synapses de s'«affaiblir» un peu. Le chercheur voit dans cette explication une fonction homéostatique: comme pour la faim, que signale le corps, le cerveau «sait» de lui même qu'il a besoin de sommeil tôt ou tard; le record du monde d'éveil chez un humain, datant de 1964, se monte à 11 jours.
A noter encore la «théorie de la simulation de la menace», de Antti Revonsuo (Université de Turku, Finlande). «Le rêve est un système naturel de «réalité virtuelle» produit par le cerveau, explique-t-elle dans le numéro de juin du magazine Sciences & Avenir. Ce système de simulation sert à nous entraîner à réagir aux situations dangereuses du quotidien. Ce serait une capacité héritée de nos ancêtres, qui aurait permis aux hommes d'apprendre à se défendre. Une fonction que l'évolution aurait sélectionnée.»
Cette théorie se base sur une explication physiologique des rêves: «Le cortex préfrontal est notamment le siège des capacités de raisonnement et de jugement, explique Sophie Schwartz. Or durant le sommeil, cette aire est désactivée. C'est pourquoi les rêves contiennent des êtres, objets ou situations étranges. Parallèlement, le système limbique, qui traite des émotions comme la peur, est très activé.»
Des rêves, les neuroscientifiques connaissent encore peu de chose. Si ce n'est qu'ils ont lieu durant toutes les phases du sommeil, et pas seulement durant le sommeil paradoxal, qui les rend néanmoins plus riches. Mais impossible, pour l'heure, d'établir par exemple un lien clair entre les mécanismes de consolidation de la mémoire et les rêves. «Pour cela, il faudrait mener des expériences de renforcement de la mémoire. Au moment où l'on voit s'allumer les aires concernées chez le sujet endormi, il faut le réveiller et lui demander de décrire ses rêves, en espérant que sa «vision» ait un lien avec la tâche entraînée la veille. Mais tout cela demande une infrastructure lourde.»
Si toutes ces théories comportent probablement une part de vérité, aucune d'entre elles n'est satisfaisante à elle seule. C'est pourquoi Mehdi Tafti, à l'UNIL, a souhaité reprendre les choses depuis le début: «Nous sommes parmi les premiers à avoir cherché des bases génétiques du sommeil», autrement dit des faits prouvant que chaque être vivant a ses besoins en sommeil inscrits dans ses gènes. Son équipe est aussi partie du principe que le sommeil est une fonction homéostatique, qui doit donc laisser des traces moléculaires si elle n'est pas satisfaite. «A ce jour, nous avons trouvé plusieurs gènes qui sont exprimés différemment en cas de privation de sommeil», indique le chercheur.
Les travaux se poursuivent dans ce domaine novateur. «Nous nous intéressons aussi aux bases génétiques d'affections comme le somnambulisme ou la narcolepsie, maladie pour laquelle un gène a été découvert il y a peu chez le chien», explique Mehdi Tafti. Qui caresse l'espoir que de nouveaux produits thérapeutiques ou une nouvelle génération de somnifère, laissant moins de traces dans le cerveau et permettant de mieux «lancer» le sommeil naturel, pourront bientôt être mis au point.
* «Comment dormons-nous?» coll. Les Petites Pommes du Savoir, no 104, Ed. Le Pommier, 64 pages. A lire aussi: «La fabrique de rêves»,de Sophie Schwartz. Ed. Le Pommier
Hémisphère culturel A la «Recherche» du sommeil perdu
Eléonore Sulser
«Peut-être même plus qu'un autre temps: une autre vie. Les plaisirs qu'on a dans le sommeil, on ne les fait pas figurer dans le compte des plaisirs éprouvés au cours de l'existence. [...] C'est comme du bien perdu.»
Il y a, cette citation le montre, comme une nostalgie perpétuelle du sommeil dans A la Recherche du temps perdu. «Longtemps je me suis couché de bonheur», la phrase inaugurale de l'œuvre monumentale, dit d'emblée que la vie endormie, tout comme la vie réelle, est d'une importance capitale pour Marcel Proust. La science rapproche aujourd'hui les deux phénomènes, or, tout comme la mémoire, le sommeil est un sujet central de La Recherche.
Sans doute parce que le sommeil est rare et précieux à son narrateur, Proust s'attache à le décrire avec précision. Et ses intuitions sont remarquables, comme le montre Fanny Déchanet-Platz dans L'Ecrivain, le sommeil et les rêves qui vient d'être publié chez Gallimard (lire Samedi Culturel du 7.6.08). Ainsi, Proust décrit dans La Prisonnière l'appropriation de la vie réelle par le cerveau endormi: «Il semble bien que le rêve soit fait [...] avec la matière parfois la plus grossière de la vie, mais cette matière y est traitée, malaxée de telle sorte [...] qu'on ne la reconnaît pas.» La dimension terrifiante du rêve, son lien avec les peurs primitives signalé par Antti Revonsuo (ci-dessus) ne lui échappent pas non plus dans Du Côté de chez Swann: «Ou bien en dormant, j'avais rejoint sans effort un âge à jamais révolu de ma vie primitive, retrouvé telle de mes terreurs enfantines comme celle que mon grand-oncle me tirât par les boucles [...]. Par mesure de précaution j'entourais complètement ma tête de mon oreiller avant de retourner dans le monde des rêves.» Marcel Proust, dont le narrateur ne cesse de lutter contre l'insomnie fait du sommeil un «bien perdu»; une composante du temps humain qui, tout comme les souvenirs, les sensations, les rêves, se dérobe et, à terme, menace de s'évanouir. Témoin que la littérature, comme la science, reste fascinée devant ce phénomène aussi familier qu'étrange.